Pour la plupart d’entre nous, les mots sport et arthrose résonnent avec des pensées limitantes comme : « c’est incompatible ! ». Pourtant sport et arthrose, c’est le combo gagnant ! Les bénéfices ? Diminuer la douleur liée à l’arthrose et redonner de la mobilité. Alors le sport, mais pas n’importe comment, s’impose comme la nouvelle routine thérapeutique contre l’arthrose.
Vous allez voir, ça va BOUGER !
Alors pour en découdre avec les clichés sur l’arthrose, qui touche près de 10 millions de personnes en France, deux experts partagent ici leurs conseils et leurs bonnes ondes pour comprendre l’arthrose et se motiver à bouger, même avec des douleurs :
- Docteur Grange, rhumatologue au CHU Grenoble-Alpes et président de l’association AFLAR (Association Française de Lutte Anti-Rhumatismale) qui défend les patients souffrants d’arthrose.
- Monsieur Clavicule, influenceur et kinésithérapeute-ostéopathe qui n’a qu’un seul leitmotiv : faire bouger et casser les clichés autour de l’arthrose.
Et pour vous encourager, j’ai recueilli les témoignages de Brigitte, Philippe et Huguette, tous les trois touchés par l’arthrose.
« L’arthrose c’est la vie ! » lance notre kiné-ostéo Monsieur Clavicule. « C’est comme les rides, c’est naturel ! » De quoi décomplexer les près de 10 millions de français touchés par cette maladie qui touche les articulations.
C’est naturel car c’est une destruction progressive du cartilage et de l’articulation. Une dégénérescence de celui qui joue un rôle de matelas ou d’amortisseur (le cartilage toujours), face aux chocs sur les articulations comme les genoux, la hanche ou l’épaule. Alors quand le cartilage se fait la malle, ça fait mal ! Les articulations ne sont plus protégées et les os frottent : c'est l'apparition de l'arthrose. C’est ce frottement qui peut provoquer des douleurs parfois bloquantes. Mais une articulation touchée par l’arthrose n’est pas forcément douloureuse. Aujourd’hui 35% des patients arthrosiques sont asymptomatiques.
Pourtant « l’arthrose ce n’est pas de l’usure. » rappelle le docteur Grange. « Car quand on dit que c’est usé, cela laisse entendre que c’est foutu. Mais au contraire il faut bouger et ne pas s’arrêter, car le sport de loisir est protecteur contre les douleurs de l’arthrose. »
- La colonne vertébrale : plus fréquente chez les seniors, mais cette arthrose reste le plus souvent « silencieuse ».
- la main : les doigts peuvent être touchés jusqu’à subir des déformations.
- les genoux et la hanche : ces arthroses sont souvent plus invalidantes car ces articulations portent le poids du corps.
- l’épaule
- le coude, la cheville ou le poignet : plus rarement atteints.
Les manifestations de l’arthrose et les contraintes articulaires qui en découlent sont variées. Quand il y a des douleurs, elles sont principalement mécaniques. « Elles s'aggravent en fin de journée et se calment au repos » précise le docteur Grange, mais elles peuvent aussi prendre la forme de raideurs, de craquements, et de déformations.
Avant de chercher si vous êtes concerné•e par l’arthrose ou non et prendre le risque de vous alarmer, je commencerai par citer le bon sens de notre kiné-ostéo Monsieur Clavicule : « Il n’y a pas de fatalité, il n’y a que de fausses croyances qui impactent la douleur de l’arthrose. Alors il faut bouger et être optimiste ! Surtout ne pas se morfondre et croire que tout est fini. »
- Les seniors
L’arthrose est une maladie qui augmente avec l’âge. Elle touche 65% des plus de 65 ans, mais pas que les seniors !
- Les personnes en surpoids
« Aujourd’hui, les personnes les plus touchées par l’arthrose sont les personnes en surpoids. » explique le docteur Grange. « Le lien est très net entre l’obésité et la gonarthrose (arthrose du genou). Car le surpoids de la personne pèse sur les articulations et « de petites molécules produites par la graisse favorisent la destruction du cartilage ». Les articulations subissent alors ce que l’on appelle un stress mécanique qui finit par abîmer le cartilage.
- Les femmes
Les études montrent que les femmes seraient davantage touchées par les arthroses du genou et de la main. Particulièrement au moment de la ménopause (sans que cela soit systématique), car la chute d’oestrogènes les rend plus sujettes aux contraintes et douleurs articulaires.
- Les ultra-sportifs
Les sportifs de haut niveau, professionnels ou non, en salle ou aux JO, « brûlent » parfois leur capital cartilage avant l’heure de par l’intensité de leurs activités sportives.
- L’obésité, le surpoids
- L’âge
- L’activité sportive trop intense
- Le port fréquent de charges lourdes
- Les gestes répétitifs
- La sédentarité
- L’hérédité
- Les fractures proches des articulations
- Les entorses à répétition mal soignées
J’attire votre attention sur le facteur surpoids et obésité. Car Le Livre blanc sur l’arthrose publié par l’AFLAR après une enquête en 2013, mise à jour en 2020 sur 4000 patients, montre qu’en 2030, 22% de la population française pourrait être touchée par l’arthrose. Et cela par le lien direct entre l’obésité et l’arthrose. Alors vous me voyez venir… L’activité physique ! Bougez, bougez, bougez !
« La première prévention c’est d’éviter le surpoids. ». En effet, l’enquête Stop Arthrose, montre que perdre ne serait-ce que 10% de son poids, améliore de 25% la qualité de vie de la personne. Ces conseils associés à une alimentation variée et équilibrée et une hygiène de vie la plus saine possible, profiteront à votre santé.
« Le premier traitement c’est l’activité physique adaptée ! » déclare le docteur Grange. « Le renforcement musculaire, associé aux activités quotidiennes fait la différence. Car pour l’arthrose du genou par exemple, quand les cuisses sont renforcées, alors les muscles protègent les articulations. »
Monsieur Clavicule raconte : « Souvent je vois des gens qui ont de l’arthrose, qui sont sédentaires et déprimés. Alors ils trouvent un coupable à leur mal-être : l’arthrose. On sait qu’il ne peut pas y avoir de retour en arrière car le capital cartilage est utilisé, mais le problème ce n’est pas l’arthrose, c’est la douleur ! En cabinet, les patients nous consultent à cause de la douleur. Alors mon boulot est celui d’un éducateur. J’essaie de les aider à bouger mais aussi à avoir un regard positif sur leur situation. Le catastrophisme et la rumination font que les gens laissent parfois tomber et c’est le piège. »
Bonne nouvelle : l’activité physique (des escaliers empruntés chaque jour à la pratique d’un sport bien choisi et adapté) permet de diminuer les douleurs liées à l’arthrose. Car comme l’explique le docteur Grange : « par le mouvement, l’articulation est mobilisée. Le muscle qui est donc renforcé va soutenir et protéger les tendons voisins et l’ensemble de l’articulation. En plus, les endorphines naturelles libérées pendant le sport permettent de baisser le niveau de la douleur et améliorer le bien-être. » Et la perte ou le maintien de votre poids peut soulager aussi les articulations sollicitées par la charge pondérale.
Pratiquer un sport c’est aussi « chercher la barrière de la raideur et travailler sur cette amplitude pour gagner en mobilité sur l’articulation » explique Monsieur Clavicule.
... vous explique que faire du sport avec de l'arthrose, c'est possible et même conseillé. En plus, il vous propose quelques exercices à effectuer sans modération.
« Le meilleur sport c’est le sport plaisir ! » répond Monsieur Clavicule. « Je pense qu’il ne faut pas dire aux gens quel sport il faut faire. Dans mon cabinet, je commence par poser la question : qu’est-ce que vous aimez faire ? Un patient de 65 ans avec de l’arthrose qui me dit : « moi ma passion c’était de courir », je lui dis : "okay on va essayer, et on va mettre en place des stratégies pour courir à votre rythme, puis un programme en commençant par de la randonnée, puis 1min de marche alternée avec 1min de course etc. »
C’est bien connu, tout est question de dosage. Alors c’est vrai que la pratique excessive surtout des sports dits « pivot » ou « contact » comme le football, le rugby ou le basket augmenteraient le risque d’arthrose car ils exercent des pressions et provoquent des chocs sur les articulations.
Comme le rappelle le docteur Grange : « Chez les sportifs de haut niveau, l’activité intensive peut déclencher de l’arthrose précoce. Mais selon le niveau, le sport peut être un traitement de l’arthrose. Protecteur et thérapeutique ! » Alors à vous d’adapter et de doser.
En groupe, avec des amis ou avec votre kiné, laissez-vous accompagner, ne serait-ce que pour rester motivé•e, adapter, doser l’intensité des exercices physiques par rapport à vos douleurs et évaluer votre progression. « Il faut bouger ! Surtout ne pas s’arrêter et ne rien lâcher » insiste Monsieur Clavicule. « Le sport peut être excellent, mais il peut blesser si on dépasse sa ligne rouge, d’où le fait d’être accompagné•e ! ». En plus des kinésithérapeutes et des ostéopathes, vous pouvez aussi faire appel à des professionnels de l’APA (Activité Physique Adaptée) qui orientent et conseillent vers des activités adaptées à votre histoire.
La balle est dans votre camp ! « Si on respecte les étapes et les signaux de votre corps, alors chaque sport peut s’adapter. L’essentiel c’est la régularité et la progressivité. »
Aucun sport n’est à proprement parler banni, mais certains sports comme la randonnée, la natation ou le cyclisme recueillent les faveurs de nos experts. Des sports sans pression comme le Pilates, le yoga, la marche nordique, la salsa ou l’aquagym sont tout autant d’options pour bouger.
Tous les jours, bougez à petite dose ! Aller chercher le pain à pieds, descendre du bus une station plus tôt, tout ce qui permet de bouger est à privilégier.
Quant à l’activité sportive à proprement parler : plusieurs fois par semaine plutôt qu’une seule fois ! « Le secret c’est la régularité, la progressivité et la répartition dans la semaine. Trois fois par semaine, avec 10 minutes d’échauffement, du renforcement, et 10 minutes d’étirements » conseille le docteur Grange. « Plusieurs activités combinées à un programme vont favoriser les résultats. D’où l’intérêt de se faire éventuellement accompagner. »
L’étude américaine Arthritis Care & Research suggère que marcher 6000 pas ou plus par jour, peut protéger les personnes atteintes d'arthrose du genou ou à risque de développer des problèmes de mobilité, tels que des difficultés à se lever d'une chaise et à monter des escaliers. Voilà un objectif et une bonne raison d’installer un podomètre et de se mettre à la marche !
« Il faut faire des exercices adaptés. » explique Monsieur Clavicule. « On peut travailler avec de la douleur, avec de l’inconfort, et petit à petit on désensibilise. Si on reste dans son canapé, c’est le meilleur moyen pour avoir mal. Alors on adapte ! Parfois il faut prendre 2 jours de repos quand il y a une crise. Alors dans ces cas là on attend de passer le pic de la crise et après on y retourne. »
« Il n’y a pas de mauvais mouvements, il y a juste des mouvements qui ne sont pas adaptés aux capacités physiques de la personne sur l’instant. » Alors tout sport qui met en mouvement et qui peut se faire est adapté aux différents types d’arthrose. La question se pose éventuellement pour l’arthrose de la main. « Pour ces personnes, je propose des exercices avec une petite balle anti-stress pour travailler les pressions, extensions, flexions etc. » raconte Monsieur Clavicule.
« Tous mes patients travaillent avec un élastique. » explique Monsieur Clavicule. « C’est pas cher, transportable, et on peut tout faire ! »
Nous vous conseillons également le ballon de Pilates appelé « Swiss ball », des petites haltères ou des bouteilles d’eau pour muscler et soutenir davantage vos articulations.
« Depuis que j’ai fait une formation « rando-santé », c’est moi qui guide les randonnées. J’avais un état inflammatoire important et pourtant j’ai réussi à emmener un groupe de 5 personnes. J’ai besoin de marcher, si je ne marche pas je deviens dingue ! Et je ne supporte pas les anti-inflammatoires. Je marche entre une à trois fois par semaine, pendant 3 heures à chaque sortie. Parfois j’ai plus de mal à tricoter ou me lever qu’à marcher ! En plus c’est convivial. »
Le conseil d’Huguette :
« Continuez de marcher ! C’est vrai ça fait très mal et parfois on n’est pas très en forme, mais il faut quand même marcher. Quand on randonne on a moins mal que devant sa télé à ruminer. Et c’est accessible à tous ! »
« J’ai pratiqué énormément de sport, enseigné le tennis à son époque dorée, fait de l’athlétisme, du vélo, de la natation, du ski de piste, de rando et de fond et même du pilotage automobile. Je regrette d’avoir été mal conseillé. Dans les années 80 on faisait du sport à outrance ! Je regrette énormément de ne pas avoir été conseillé sur la qualité et poussé à la quantité. On a un capital cartilage, et quand il est détruit il ne semble pas se régénérer. Aujourd’hui, j’ai atteint le stade où il me faudra une prothèse d’épaule. »
Le sport hygiène
« Le sport, ça fait partie de mon équilibre ! J’ai baissé mon degré d’exigences sportives et j’ai changé ma façon de faire avec du sport non porté par soi-même. Pour compenser la course qui était trop traumatisante, je fais du vélo ; et encore je me positionne de façon à ne pas avoir trop de poids sur l’épaule. L’an dernier, le matin je faisais du stepper pendant 45mn et ça me faisait du bien ! Surtout parce que ça drainait l’articulation et que ça me permettait de mieux marcher après. »
Les conseils de Philippe :
« Ne perdez pas le moral ! Ca nous tombe un peu dessus mais le corps a un bon potentiel pour se régénérer. Continuez de bouger et faites des étirements. Enfin, faites du sport intelligemment : cherchez à toujours faire fonctionner vos articulations et votre corps, pour l’entretien et stimuler le flux sanguin qui draine. »
« J’étais arrivée à un point où je me demandais comment j’allais rentrer dans les transports en commun. Quand on est à ce stade de la maladie, il faut être vraiment volontaire et actrice, car par moment la douleur est plus forte que le bénéfice qu’on pense tirer de l’activité.
L’arthrose du genou a réduit drastiquement mon activité sportive, mais les médecins me disaient que c’était important de garder une activité physique. Alors pendant 10 ans je suis allée nager à la piscine tous les dimanches. C’était pire si je ne bougeais pas. Je ne pouvais plus courir derrière mon bus, mais dans l’eau je pouvais courir, sautiller. Et en plus ça me faisait du bien au moral.»
Livre : Stop à l’arthrose, Docteur Laurent Grange
Sources études : INSERM, OMS, AFLAR, STOP ARTHROSE
Remerciements : Merci au Docteur Laurent Grange, à l’AFLAR, à Monsieur Clavicule, à Adrien Vanhems kinésithérapeute pour la mise en lien avec ses patients, et Thibault Dufoix, ostéopathe pour la relecture.