Votre enfant est peut-être le dernier choisi au moment de faire les équipes de sport à l’école. La confiance diminue progressivement... Comment arrêter cette spirale et faire en sorte qu’il s’épanouisse dans une activité sportive ?
Parfois, c’est comme ça, votre enfant n’aime pas le sport, parce qu’il ne voit pas l’intérêt ou le feeling ne passe pas avec le moniteur, bref, il ne prend pas plaisir. Et parfois...il aime le sport et vous le voyez en difficulté dans sa pratique, est-ce que c’est grave ? Comment l’aider ? Toutes les réponses à ces questions ici.
Gaëlle Cailleaux, psychomotricienne, diplômée d’Etat, me rapporte quelques phrases perdues dans un discours -d’abord bienveillant- de parents qui viennent la consulter pour leur enfant : “Mon enfant est nul, tout sa mère.” “ Moi je suis comme ça donc c’est normal.”
Des phrases, qui personnellement me font froid dans le dos, comme si une certaine fatalité graviterait autour de nous ou une étiquette qui nous collerait à la peau dès la petite enfance. Bon, on peut aussi entendre le manque d’estime qu’un parent peut avoir et transmettre à son enfant...sans faire de psychologie de comptoir -c’est plus fort que moi-, je laisserai la parole à notre spécialiste Karine Weber, psychologue, un peu plus loin dans l’article. Revenons aux enfants et à leur niveau sportif, Gaëlle m’évoque deux aspects principaux qui influencent les capacités motrices et cognitives d’un enfant : la prédisposition physique de base et l'environnement familial.
Une histoire de tonus de fond et d’action que je ne détaillerai pas ici -parce que c'est bien trop technique pour moi-. Ce qu’on peut retenir, c’est que certains enfants peuvent avoir un manque de tonus musculaire qu’il faut, dans ce cas, stimuler un peu plus que les autres. Car selon Gaëlle : “Avec un faible tonus, l’enfant peut avoir des difficultés à bouger, alors il ne peut pas découvrir, sa curiosité n’est pas stimulée, il ne manipule pas et ne peut pas construire son schéma corporel.”
Le schéma corporel, c’est ce qui va permettre d’être à l’aise avec son corps et pouvoir organiser ses mouvements en fonction d’une situation donnée. D’où l’importance de cette construction et donc de bouger ! En séance de psychomotricité, Gaëlle retravaille la construction cognitive, et apprend aux enfants à reprendre plaisir dans le mouvement : “s’il n’y a pas de plaisir à bouger il n’y a pas d’envie. Il est vite fatigué, il n’arrive pas à jouer avec les copains, il perd en estime de lui ,manque progressivement de motivation, etc.” Un cercle vicieux qui peut être rompu par la pratique d’une activité physique à n’importe quel âge.
Chers parents, vous êtes les premiers à pouvoir donner envie de bouger à vos enfants ! Vous êtes leur exemple...si si si...Gaëlle m’a glissé en riant : “Dans mes séances, je motive à la fois les parents et les enfants !” Détendez-vous, il y a plein de moyens de booster simplement son enfant et lui donner du plaisir à se dépenser.
Ces conseils s’adressent à tous les parents. En cas de manque de tonus pour lequel vous pensez avoir besoin d’accompagnement, rapprochez-vous de spécialistes pour un traitement adapté comme un·e psychomotricien·ne.
D’après Gaëlle, psychomotricienne, le jeu est un formidable moyen de donner du plaisir dans l’activité physique. Du jeu de la brouette au foot dans le jardin, lâchez-vous ! Tout en sachant que dès 2 ans, on peut faire des activités de ballon ex: recevoir le ballon, le lancer, viser une cible avec le ballon, le rouler, le faire rebondir etc.
Je vous le disais plus haut, vous êtes le meilleur exemple pour faire de votre enfant un sportif. Dégainez le tapis de gym plusieurs fois pour vos séances de sport et vous verrez que ce sera lui qui vous incitera à le sortir quand vous n’en n’aurez pas forcément l’envie -genre le dimanche après midi-. Et si le sport ou l’activité n’est pas dans vos habitudes ni au programme (ça arrive même aux meilleur·es;)), laissez sa tante, son grand père ou ses cousin·es le stimuler sportivement de manière régulière.
Parfois l’enfant ne se sent pas compétent dans un sport alors, il rejette la discipline. Et parfois, ce n’est pas le coup de cœur avec l’activité choisie, alors il ne prend pas plaisir à progresser dans sa pratique. Apprendre à connaître son enfant pour qu’il pratique un sport qui l’épanouisse, c’est l’approche de Karine Weber, psychologue et professeure de tennis : “Il faut choisir un sport en fonction du tempérament et de la personnalité de l’enfant pour qu’il se sente en phase et se sente heureux. Essayez de comprendre quels sont les moteurs de motivation de votre enfant, par exemple : s'il a une préférence pour conquérir (un·e compétiteur·rices né·e) ou partager (l’esprit d’équipe avant tout) ou encore, simplement bouger (le plaisir du mouvement).”
Karine rappelle un point fondamental pour le bien-être de votre enfant : “On fait faire du sport à nos enfants pour qu’ils aillent bien, pas pour répondre à nos exigences de parents.” C'est peut être un peu brutal dit comme ça, mais ça vaut le coup de se poser la question : pourquoi mon fils ou ma fille pratique cette activité ? Pour faire comme moi ? Pour me faire plaisir ? Parce que je ne lui ai pas vraiment laissé le choix ? Parce qu'il ou elle a réclamé ? Il est même avisé de co-choisir avec l’enfant l’activité qui lui correspond en le laissant tester, en lui donnant droit à “l’erreur”. Pourquoi ne pas essayer le multisport dans un premier temps pour aider à trouver l’activité qui lui procurera du plaisir ?
C’est dit, “l’entraînement”, “l’effort”, à n’importe quel niveau, et pour n’importe quel objectif, aide à se sentir capable et donc confiant. D’après Karine Weber, la confiance s'acquiert avec le savoir-faire : “On se sent nul parce qu’on n’a pas confiance, on ne se sent pas capable. Mais si je m’entraîne, je sais faire. Par exemple, j'ai confiance en moi en tennis parce que je m’entraîne.”
Karine pointe aussi les difficultés que les parents ont à accepter les échecs chez leurs enfants : “Ce qui importe ce n’est pas qu’il ait raté ou non, c’est comment il va se relever, fuir ou persévérer. Qu’il rate ou qu’il réussisse, l’enfant sera performant s’il a le bon état d’esprit. Rater, c’est important, ça fait partie de la construction.”
A contrario, les parents peuvent avoir tendance à sur-valoriser les réussites : “On accorde parfois trop d’importance aux réussites, cela renforce la peur de l'échec. Ça n’empêche pas d’être content d’une réussite mais j’invite les parents à être fiers de leurs enfants pour ce qu’ils sont et non ce qu’ils font.” Il est important de construire l’estime des enfants en valorisant ce qu’ils ont mis en place, plus que le résultat car en cas d’échec, cela risque d’être difficile. Il pourrait se dire : “je rate, donc je suis une mauvaise personne.”
Faire en sorte qu’un enfant ne se sente pas nul en sport, c’est possible, mais ce n’est pas la même histoire en fonction de son âge. Un enfant peut être très actif jusqu’à ses 10 ans et à l’arrivée dans la période adolescente, PAF ! Les habitudes de pratiques sportives peuvent être perturbées, les centres d’intérêt évoluent et la manière dont les parents peuvent agir aussi...
Retrouvez les conseils de Karine Weber en podcast sur toutes les plateformes d'écoute sur la chaîne de podcast de Decathlon "conseils de sportifs·ves".
D’après la dernière étude de l’OMS, 8 ados sur 10 ne pratiquent pas assez de sport. Différentes raisons sont liées à ce chiffre peu rassurant et plusieurs conséquences en découlent dont l’augmentation des maladies cardio vasculaires, le diabète chez les jeunes, etc. Pourquoi les jeunes décrochent-ils du sport ? Comment les rattraper ? Et si c’était juste de la flemme ou de la gêne plus que de l’incompétence...
L’adolescence est une période particulière, on ne va pas se mentir, on est tous et toutes passé⸱es par là. Des vagues d’hormones modifient le corps -pas toujours comme on le souhaite- et on a tendance à vouloir être considéré⸱e comme un⸱e adulte mais avec toute l’insouciance et la désinvolture qui caractérisent ce moment de vie. Bref, pas toujours simple d’intéresser un ado surtout quand il est confronté à ses limites ou au regard des autres, comme en sport.
Gabriel Jallat, professeur d’EPS au collège, observe une chute importante de la motivation à faire du sport chez les filles vers 13/14 ans et chez les garçons vers 14/15ans : “Il suffit d’un ou une leader de groupe qui décide que le sport “c’est nul” et toute la bande va suivre. La mixité peut aussi être un frein surtout en natation parce que des complexes physiques apparaissent.” Et avant même de parler d’enfiler un maillot de bain -même en non mixité- le vestiaire peut-être un moment redouté...
“C’est trop dur” “j’n’y arrive pas” “j’n’ai pas envie de courir pour rien”, vous aussi comme Gabriel vous entendez ce genre de phrase dans la bouche de votre grand enfant ? Et vous l’avez même peut être prononcé -ou vous la prononcez encore-.
En plus de sa punchline : “Si c’est facile, tu n’apprends rien, alors entraîne toi.” Gabriel a trouvé des solutions pour garder le plus longtemps possible la motivation chez ces adolescent⸱es récalcitrant⸱es et leur redonner le goût de l’effort : “Je propose des séances de sports ludiques avec peu de technique qui demande plus de concentration et d’effort. Je leur donne des repères avec une structure de cours presque toujours identiques. Peu de consignes, il faut que ça aille vite.
Je joue aussi sur la nouveauté avec des sports différents de d’habitude comme la combinaison d'activités de lancé, avec la pétanque, le molky et les palets bretons par exemple. Dernièrement j’ai testé les challenges, c’est nouveau, ça se pratique en équipe et c’est ludique ! Ça crée une émulation dans la classe, ça motive tout le monde à des niveaux de pratiques différents.”
Une mauvaise expérience de sport à l’école peut en rebuter plus d’un⸱e à continuer l’activité physique une fois adulte. Combien d’adultes se sont déjà entendu dire en soirée “Le sport ce n’est pas pour moi, j’étais nul⸱le en sport à l’école.” L’une des nombreuses missions d’un⸱e professeur⸱e d’éducation physique est de donner le goût à poursuivre la pratique sportive après le parcours scolaire. Facile à dire, mais quand la course d’endurance est un véritable enfer ou lorsqu’on est “désigné volontaire” dans les buts ou que l’on est choisi⸱e en dernier, le plaisir et la confiance sont mis à rude épreuve.
Pour ça, Gabriel a des astuces : “Pour choisir les équipes, ça m’arrive qu’ils soient en binôme, comme ça ils sont minimum avec un copain et ils ne sont jamais les derniers à être choisis. J’impose aussi des critères de choix, comme ça, ils ont une semi-liberté et finalement les équipes s’équilibrent. Et pour éviter le regard des autres, sur les épreuves artistiques par exemple, ils ne sont jamais seuls devant tout le monde.”
Gardez en tête que ce n’est pas parce que votre enfant n’aime pas le sport à l’école qu’il n’aime pas le sport tout court ! Les sports en association ou l’activité physique en salle de remise en forme ou à l’extérieur peuvent peut-être l’attirer davantage. Après tout, l’important, c’est que votre enfant soit en mouvement.
Que ce soit à l’école ou en club sportif, l’éducateur et sa pédagogie tiennent une place centrale dans le maintien de la pratique sportive des adolescent⸱es. Karine Weber, psychologue : “le bon coach, c’est celui ou celle qui adapte la pratique sportive aux enfants pour les mettre en situation de réussite et de progrès. C’est aussi celui ou celle qui croit en les capacités de votre enfant.”
Gabriel Jallat, insiste quant à lui sur le fait que l’enfant puisse pratiquer l’activité qui lui convient le mieux, même s’il a bien conscience des différents freins que les parents peuvent rencontrer : “Il faut qu’il y ait un accès facile à la discipline que l’enfant a choisie, que le budget corresponde au porte monnaie des parents et que les créneaux conviennent à l’organisation familiale. Il ne faut pas non plus négliger les sections loisirs des clubs, pas besoin d’être systématiquement en compétition pour pratiquer un sport.”
Comme le dit Karine Weber : “Vaut mieux jouer le match que le regarder”. Mettez vos enfants en mouvement, peu importe l’allure qu’ils ont. Déceler leurs points forts et trouver le sport ou l’activité qui lui donnera l'enthousiasme, le plaisir et les yeux qui brillent.
Je remercie Gaëlle Cailleaux, Karine Weber et Gabriel Jallat pour leur temps et leur expertise.
Retrouvez le livre de Karine Weber "croire, oser, rire" ici