Le sport améliore la qualité de vie des femmes atteintes d’un cancer du sein et ce pendant et après le traitement. On vous en dit plus avec les interviews de Laurence Vanlemmens, oncologue et Hervé Mocaer, éducateur médico-sportif au centre Oscar Lambret de Lille.
Reconnue comme une thérapeutique non-médicamenteuse par la Haute Autorité de santé, l’activité physique offre des bénéfices importants en termes de qualité de vie et de survie pendant et après le traitement d’un cancer.
Laurence Vanlemmens, oncologue, et Hervé Mocaer, éducateur médico-sportif, tous deux membres du Pôle Sport & Cancer au Centre Oscar Lambret de Lille, nous expliquent quels sont les effets du sport pendant et après un cancer du sein.
Laurence Vanlemmens – Oncologue : Durant ou après le traitement, la pratique d'une activité physique et sportive est conseillée et même recommandée et devrait faire partie intégrante du parcours de soin en raison des bénéfices prouvés sur la qualité de vie et la réduction des récidives et de la mortalité. L’ancien adage « vous êtes fatiguée, reposez-vous » n’est plus vrai aujourd’hui.
Nous savons désormais que la pratique d’une activité physique dès le diagnostic contribue à lutter contre la fatigue induite par les traitements. La fréquence, l’intensité et la durée de la pratique sportive participent à l’efficacité de la thérapie, nous les définissons et les adaptons à chaque patiente à la suite d’un bilan médico-sportif initial et d’évaluations régulières.
Hervé Mocaer – Éducateur médico-sportif : Quand on est fatigué on a tendance à perdre en masse musculaire et à prendre en masse grasse, c’est un cercle vicieux qui accentue la vulnérabilité. Les capacités cardio-respiratoires régressent, les efforts deviennent contraignants, l’image du corps est atteinte. C’est pourquoi, dans la mesure du possible, il faut en faire, car le sport lutte contre la fatigue et la dynamique négative qu’elle implique.
Pratiquée de façon précoce et régulière pendant et après le traitement, l'activité physique favorise la lutte contre le déconditionnement (inactivité physique et sociale que la maladie ou les effets secondaires peuvent favoriser) et le maintien de son schéma corporel.
L.V. : Ils sont nombreux, le sport améliore la qualité de vie par l’aspect social et psychologique qu’il recouvre.~Il permet de diminuer l’anxiété, la prise d’hypnotiques, le risque d’émergence d’une dépression.
Médicalement, il lutte contre les effets secondaires du traitement comme les douleurs articulaires liées à la chimiothérapie et l’hormonothérapie, diminue les lymphœdèmes* (Baumann 2018) ou les douleurs neurologiques dues à des neuropathies* liées à certaines chimiothérapies.
Il combat également la diminution de la masse musculaire, la sarcopénie.
Il améliore les fonctions physiques que sont l’endurance et la force musculaire, l’équilibre et la souplesse.
Il lutte également contre la sédentarité et le surpoids. On sait aujourd’hui que le bienfait existe dès une pratique modérée, et est d’autant plus important que la pratique est soutenue et se maintient dans le temps. Les bienfaits de l’activité physique et sportive s’expliquent par des actions sur les mécanismes biologiques comme la diminution de l’inflammation, une amélioration de la sensibilité à l’insuline, une diminution des œstrogènes et un renforcement du système immunitaire
H.M. : Les patientes atteintes d’un cancer du sein souffrent parfois de désocialisation du fait d’un arrêt de travail et d’un manque d’estime de soi provoqué par la maladie. Durant cette période, l’image corporelle peut évoluer (perte de cheveux, prise ou perte de poids, fatigue, modifications de la peau) et favoriser la crainte du regard des autres et le repli sur soi.
Le sport pendant et après un cancer demeure un vecteur de rencontres, d’échanges entre les personnes, et, lorsqu’il est pratiqué dans des structures spécialisées, il constitue une occasion de rencontrer des femmes ayant des expériences similaires. Dans tous les cas, il contribue à retrouver de la confiance.
*Lymphœdème : gonflement d’un membre dû à une accumulation de liquide lymphatique. Il provoque une sensation de lourdeur et de tension pouvant générer des douleurs lombaires et/ou articulaires.
*Neuropathie : désigne un trouble qui touche les nerfs du système nerveux périphérique qui parcourent le corps hors du système nerveux central (cerveau, moelle épinière et cervelet). Elles peuvent provoquer des fourmillements dans les mains et dans les pieds.
EN POST-TRAITEMENT, UNE ACTIVITÉ MODÉRÉE D’AÉROBIE DE 30 MN PAR JOUR COMBINÉE À DU RENFORCEMENT MUSCULAIRE PERMET DE RÉDUIRE LE RISQUE DE RÉCIDIVE.
L.V. : Bien entendu, ce qu’on explique aux patientes, c’est que l’activité physique n’est pas forcément une activité sportive. On prend en compte l’activité liée au quotidien comme les transports, la profession, les tâches domestiques, les loisirs pour évaluer les activités physiques afin d’établir un programme de soins approprié et personnalisé.
Contrairement à un club de sport, nous adaptons la pratique sportive aux besoins et aux limites de chacune, et non l’inverse.
Selon les profils, les femmes effectuent des séances de sport en toute autonomie, ou dans des structures destinées à les accompagner.
H.M. : Lorsque des patientes nous expliquent qu’elles n’ont jamais fait de sport ou même d’activité physique, nous sommes là pour les rassurer et les accompagner.
La coordination des soins et des compétences est essentielle. En fonction des besoins, nous pouvons les orienter vers d'autres acteurs (rhumatologue, kinésithérapeute, diététicien...). Marche, danse, course à pied, la grande majorité des sports sont recommandés, nous cherchons avant tout à trouver un équilibre entre le plaisir de la personne à pratiquer telle activité physique et les objectifs thérapeutiques qui permettent d’en apprécier les bienfaits.
Le 16 avril 2018 est peut-être pour vous une date parmi tant d’autres. Pour Céline, ce jour est celui où tout a basculé. Le 16 avril 2018, les médecins lui annoncent qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. Céline n’a alors que 32 ans.
D’abord, il y a la révolte, la colère. Puis vient la peur : celle de voir son sein et ses cheveux disparaître… Celle de ne plus être. Et enfin, un sentiment qui se fait entendre plus fort que tous les autres et qui demeure encore aujourd’hui : l’urgence de vivre. Et pour vivre, Céline a un allié : le sport. Enfin, disons plutôt une nouvelle vision du sport... Une pratique à travers laquelle la jeune femme prend pleinement conscience de son corps, d’elle-même, mais aussi des autres.
Céline transmet, Céline partage. Dans son association, Douceur en soi, elle accompagne d’ailleurs les femmes atteintes d’un cancer. Son leitmotiv ? Être en vie, et apprécier de l’être à chaque seconde via la pratique sportive... Une bouffée de bienveillance que vous n’êtes pas prêt·e d’oublier !
Bonne écoute.
Evidemment, rien ne remplacera les conseils de votre médecin. Pour toute reprise d'activité sportive, activités dans le cadre d'un parcours de soin, augmentation de l'intensité de votre effort... l'avis de votre médecin, de professionnels de santé, reste primordial.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Est-ce que le sport peut jouer un rôle pendant et après le traitement d’un cancer du sein ?
N’hésitez pas à nous partager vos expériences.