Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex-“Barjot”

Des débuts de la professionnalisation au championnat du monde de cette année, on décrypte ce sport avec l'ancien pro Philippe Schaaf.

Philippe Schaaf commence à jouer au handball à l’âge de 6 ans, un peu par hasard. 
Quelques années plus tard, c’est dans les vestiaires des championnats du monde, puis de ceux des Jeux Olympiques qu’il pose son sac de sport.
Aujourd’hui, alors qu’il a mis fin à sa carrière de joueur professionnel, il nous partage ses souvenirs et son regard sur l’évolution du handball français.

Découvrir le handball

À 6 ans, Philippe Schaaf fait du judo avec un copain d’école. Mais malgré son jeune âge, il se dit déjà que son sport est ailleurs. “J’étais grand et un peu pataud et je tombais tout le temps” raconte-t-il.
Il se lance dans la découverte du handball aux côtés de son frère déjà pratiquant. “C’est l’avantage du handball, on a besoin de tous les gabarits pour construire une équipe” dit-il en souriant.

Les années passent, Philippe continue à marquer des buts sans penser à en faire son métier : “les handballeur·ses de ma génération ne jouaient pas pour gagner leur vie.” Jusqu’à la fin des années 80 - 90, le handball était uniquement un sport loisir, amateur : “ il n’y avait pas d’argent ”.

À la veille des années 1990, Philippe a 20 ans. Certains clubs français se professionnalisent et
“libérent du temps aux joueurs pour qu’ils pratiquent”.
Philippe Schaaf quitte donc la ville où il a grandi, Strasbourg, direction : le club de Créteil. On nous payait un appartement et on nous donnait 4000 francs. On vivait, mais tout juste.”  Peu lui importe, pour jouer au handball, Philippe “aurait tout fait”.
Un an plus tard, on lui propose de jouer et de s’entraîner davantage, avec un revenu : “je me suis dit, waouh, mais où est-ce que je signe ?”

Le handballeur fait partie de la première génération de joueurs professionnels, aussi baptisée “Les Barjots”.


Ce surnom est donné à la première Équipe de France masculine professionnelle de handball entre 1933 et 1966. "Les Barjots" décrochent une médaille olympique en 1995. Une récompense qui se distingue également comme le premier titre mondial français remporté par un sport collectif.
Pourquoi “Les Barjots” ? Pour représenter l’esprit toujours amateur ainsi que la convivialité de cette équipe au niveau professionnel.

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

“Mes amis me prenaient les cours, je révisais dans les bus quand on partait en déplacement. ”

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

Ce qui change quand on devient sportif·ve pro

Quand on passe professionnel·le, “notre priorité devient le sportreconnaît l’ancien joueur pro. Il ajoute : “tout ce qui est à côté devient presque accessoire” et il n’est pas toujours facile de trouver un équilibre.
De son côté, lorsqu’il est passé professionnel, Philippe a quand même continué les études, mais il n’a pas pu finir. “J’étais toujours parti”, explique-t-il ainsi.
À cette époque, les cursus scolaires n’étaient pas encore, comme aujourd’hui, adaptés à cette charge sportive : “mes amis me prenaient les cours, je révisais dans les bus quand on partait en déplacement” se souvient-il.
Il termine tout de même ses études à la fin de sa carrière.

S'il a mis fin à sa carrière professionnelle en 2003, Philippe Schaaf garde un pied (voire deux) dans le hand, en jouant pour le loisir et en entraînant des équipes jeunes.
Il suit donc de près l’évolution du sport.

Et aujourd’hui, comment devient-on handballeur·se pro ?

“Maintenant, les jeunes suivent des circuits de formations, et hors circuit, c’est très compliqué d’obtenir un contrat professionnel. À mon époque, on pouvait passer à travers les mailles du filet”.

Selon Philippe Schaaf, c’est ce suivi de la performance et du haut niveau qui fait aujourd’hui le succès du sport en France, mais “cela peut aussi être dangereux”.
Il explique : “poussés à outrance, les jeunes peuvent négliger leurs études et se dire que de toute façon, ils gagneront suffisamment d’argent en pratiquant leur sport.” Pourtant, il le rappelle, “des élu·es pour le très haut niveau, il n’y en a pas beaucoup”.
Mais ne vous découragez pas  ! Le secret, selon Philippe, c’est de toujours tenter sans pour autant “mettre tous ses œufs dans le même panier et ne penser qu’au sport”. D’autant plus que, même à haut niveau, une blessure peut mettre un terme prématuré à une carrière.

Pour devenir joueur·se professionnel·le Philippe Schaaf ne cache pas qu’il faut également être capable de s’investir personnellement, et ce, de manière intense :  “le haut niveau, c'est ingrat, il faut être prêt à faire beaucoup d’efforts pour parfois peu de récompense au bout”, reconnaît-il. Sur ce point, il précise qu’il en est de même selon l’époque et les sports.

Car aujourd’hui, en handball, même si le nombre d’élu·es a légèrement augmenté avec l’apparition de deux ligues professionnelles en France, le haut niveau reste encore peu accessible : seules 25 équipes permettent à leurs joueur·ses de vivre de leur sport dans notre pays.
La passion et l’amour du hand doivent ainsi être deux critères indispensables pour penser à une carrière professionnelle.

Alors à chaque jeune qui rêve d’une carrière professionnelle sportive, Philippe Schaaf partage un conseil : “Vis à fond tes rêves, engage-toi, sans fermer les yeux”, car avec des efforts, et en s’entraînant dur, “c’est faisable”.

De ces moments difficiles, il fait lui aussi le bilan : “Tout ce que j’ai mis de côté pendant mon adolescence et ma jeunesse, je ne l’ai jamais regretté, parce que j’ai fait quelque chose que j’aimais”.
Bien sûr, il le rappelle, les coups de mou arrivent aussi, mais il faut rester vigilant pour qu’à ce niveau, “le sport ne devienne pas une corvée, sinon, il faudra arrêter”.

“Des élu·es pour le très haut niveau, il n’y en a pas beaucoup. ”

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

C’est quoi le handball aujourd’hui ?

“C’est un sport qui gagne” répond avec sourire Philippe Schaaf.

Alors pourquoi ?
Tout d’abord, grâce aux structures mises en place. Le handballeur reconnaît qu’en France, il y a aujourd’hui un vrai et bon processus de détection et de suivi de la performance. L’accompagnement est de plus en plus sérieux aussi bien sur le plan physique, technique que mental : “tous les clubs professionnels ont l’obligation d’avoir un centre de formation, ce qui permet d’insérer plus facilement les jeunes dans le monde professionnel du handball” et ce, depuis presque, 30 ans, explique Philippe Schaaf.

D’après lui, c’est ce qui permet d’avoir un bon niveau durable en France sans être tributaire des générations. Voilà aussi, ce qui différencie le handball français : “très peu de pays ont ces structures-là en place et c’est pour cela que l’on sort régulièrement des joueurs”.

Et les supporteur·ices français·es ?

De plus en plus de personnes s’intéressent et suivent le handball par sa médiatisation et ses résultats : “En 2012, quand les Français ont été sacrés champions olympiques, j’étais entraîneur des moins de 11 ans. À la rentrée scolaire, on est passé dans mon club de 11 à 40 enfants sur cette tranche d’âge”.

Une culture hand en croissance, qui fait qu’aujourd’hui en France, “le hand est un gros sport avec plus de 500 000 licenciés”. “Je pense que c’est aussi lié aux valeurs du handball qui plaisent”, ajoute Philippe Schaaf, “simplicité, accessibilité, combativité”.

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

Le handball féminin dans tout ça ?

Selon Philippe Schaaf, il y a 20 ans, les équipes féminines de handball étaient faibles techniquement parlant. Mais grâce à une meilleure médiatisation, un intérêt grandissant et aux bons résultats du sport ici encore, de plus en plus de femmes ont fait naître une vocation. Les clubs se sont alors mieux structurés, ce qui a fait évoluer le hand féminin et sa qualité.  

Pour davantage de femmes sur les terrains de handball, l’espace médiatique accordé à ce sport doit être entretenu. “Cette année, c'est la première fois qu'en France, on retransmet tous les matchs des Championnats du Monde en clair et les audiences sont bonnes ! Il faut garder cet élan.”

Aujourd’hui, en plus d’avoir gagné en technicité, les équipes féminines de hand, “ont su garder de la fluidité dans leur jeu”.

Le handball, un sport qui se diversifie

Le handball est un sport compliqué, technique, alors “les nouvelles pratiques autour, permettent de démocratiser le sport”, explique l’ancien pro.

Aujourd’hui, il existe plusieurs variantes de la discipline comme le handfit, le handensemble, le hand à 4 et le beach handball.
Ces sports permettent de rendre plus accessible le sport et d’aller plus loin que le hand académique.  “Ce n’est pas toujours facile d’être 14 et d’avoir un terrain de jeu disponible”, souligne ainsi Philippe Schaaf. Avec le hand à 4 par exemple, 4 joueurs et un demi terrain vous suffiront pour lancer une partie.

Alors : un avenir serein pour le sport ?

Et bien… Pas complètement.
“Avant, tout le monde faisait du handball dans le cadre de son cursus scolaire, aujourd’hui c’est moins le cas”, constate le handballeur. Selon lui, cela serait lié à l’apparition de nouvelles pratiques sportives.

Inquiet à ce sujet, il précise que cela reste “un vrai point de vigilance” pour le handball français. S’ajoute à cela les contraintes matérielles auxquelles sont confrontés les clubs qui rencontrent des difficultés pour obtenir la disponibilité des salles de sport qui se voient occupées par d’autres activités sportives.

Mais confiant envers les compétences et la qualité des équipes et du processus de recrutement dans notre pays, Phillippe Schaaf nous rassure, le handball français a normalement, encore de beaux jours devant lui : “On continue d’avoir de bonnes valeurs avec le hand, c'est le plus important, et j’espère qu’on les gardera longtemps”.

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

Des règles du jeu qui évoluent

Aujourd’hui, tous les clubs ont un préparateur physique spécifique, ce qui n’était pas le cas auparavant. La préparation physique fait entièrement partie de la routine des sportif·ves, alors qu’avant, “c’était la partie qui nous embarrassait” confie Philippe Schaaf.

Des préparations plus pointues dans lesquelles les clubs mettent davantage de moyens et d’énergie, essentiellement pour plus de performance, mais aussi, pour prévenir les blessures et assurer la bonne santé des joueur·ses.
“Si tu n'es pas prêt physiquement, tu n'as aucune chance” explique l’ancien pro. Il ajoute : “il ne s’agit pas d’avoir des gros bras, mais d’avoir une capacité à résister, à prendre des chocs, à courir vite et à récupérer rapidement”.
Un sujet qui se veut commun à de nombreux sports et qui questionne : “aujourd’hui, les joueur·ses sont très préparé·es et donc plus lourd·es, rapides et résistant·es, les contacts se veulent parfois, en conséquence, plus violents”.

Face à ce constat, ce sont donc les règles du jeu du handball qui évoluent : “tout ce qui peut être dangereux aujourd’hui est sanctionné, et ce, que ce soit volontaire ou non”. Ces mises à jour veulent avant tout protéger les joueurs “ça sécurise le jeu de ce sport de contact”.

D’autres règles ont aussi évolué au sujet de la zone d’engagement rapide “pour rendre le jeu plus spectaculaire, ce qui fait aussi aujourd’hui l’attractivité de ce sport” explique Philippe Schaaf.

“Il ne s’agit pas d’avoir des gros bras, mais d’avoir une capacité à résister, à prendre des chocs, à courir vite et à récupérer rapidement. ”

🎧 Notre podcast

Vos yeux ont brillé en suivant le parcours de notre équipe française de handball ? Pour vous aider à pousser la porte d’un club de hand, je vous propose d’écouter Philippe Schaff, ex-joueur de l’équipe de France de hand dans les années 90, qui nous parle avec passion de son sport. ✨
À quel âge on commence à jouer au handball ? Qu’est-ce que ça apporte physiquement et mentalement ? Quelles valeurs cultivent ce sport ? Sont les nombreuses questions que nous abordons ensemble sur cette pratique collective de plus en plus répandue.🤾‍♂️🤾‍♂️

Alors si ces lignes et ce témoignage ou bien le championnat du monde de handball suscitent chez vous des vocations, n’ayez pas peur de tester, ni de vous lancer en gardant en tête le bel adage de Philippe Schaaf : “Fais ce que tu veux, mais fais le bien”.

Le handball : d’hier à aujourd’hui avec un ex- “Barjot”

Manon

Rédactrice sport

"Runneuse de coeur, je suis toujours partante pour tester avec vous de nouveaux sports !
Mon objectif ? Vous transmettre mes tips et ma passion pour le sport à travers mes contenus."

Pour + de sujets handball : 

Le HANDFIT : la nouvelle pratique sportive associée au Handball !

Le HANDFIT : la pratique sportive associée au Handball

Vous avez entendu parler récemment d’une nouvelle pratique sportive appelée le Handfit ? Découvrez dès à présent ce qu’est cette nouvelle tendance !
debuter-handball

Le Handball, un sport encadré : les règles et sanctions

Le handball est un sport collectif où le contact avec l’adversaire est fréquent. Ces contacts peuvent parfois paraître dommageable mais ils sont contrôlés et sanctionnés lorsqu’ils sont trop violents grâce à nos fameux arbitres. Cependant, il n’y a pas que les contacts entre joueurs qui sont cadrés.
handball_debuter

Les différents tirs au Handball !

Comme vous le savez, le Handball est un sport riche. La diversité des tirs qui le composent en témoigne d’ailleurs parfaitement. Nous vous invitons d’ores et déjà à faire tomber votre tenue de ville au profit de votre équipement de handball. Vous n’aurez même pas terminé de lire cet article que vous trépignerez déjà d’impatience à l’idée d’aller arpenter le terrain pour aller perfectionner votre technique de tir. Vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous a pas prévenu.
handball_debuter

Zoom sur le gardien de but de Handball !

Vous débutez sur le poste ? Vous y avez été propulsé par votre coach ? Ou vous pensez que ce poste est fait pour vous? Dans tous les cas : FÉLICITATIONS ! Vous entrez dans le cercle fermé des gardiens de handball et je vais vous accompagner, dans cet article, à mieux appréhender le poste et ses spécificités si particulières.
handball_debuter

Tout savoir sur la défense au handball

A l’approche des Jeux Olympiques 2024 où la France tentera de défendre son titre chez elle, vous vous êtes fait la promesse de devenir LE défenseur de votre équipe. La moitié du chemin est faite si vous en avez l’intention, mais avant de se comparer à des Didier Dinart, Cédric Sorhaindo ou Ludovic Fabregas - les piliers de la défense reconnus (passés ou présents) de l’équipe de France, commençons par le début : Connaissez-vous les différents moyens de défendre au handball?