Handisport : quelles sont les épreuves de l'athlétisme ?

Au sein du mouvement handisport, le para athlétisme (ou athlétisme handisport) occupe une place de choix. Courses, lancer de massue, saut en longueur, … En fauteuil roulant ou debout, les épreuves sont organisées en catégories selon le degré de handicap des athlètes. Décryptage !

Sprinter sur 100 mètres grâce à une prothèse de tibia, sauter en longueur malgré une déficience visuelle ou une paralysie cérébrale, lancer un javelot depuis son fauteuil roulant… encore impossibles il y a moins d’un petit siècle, ces performances sportives belles et exigeantes sont désormais le quotidien d’un grand nombre d’athlètes. Un développement de la pratique handisport rendu possible par la médiatisation des Jeux paralympiques mais aussi l’apparition de nouveaux équipements techniques. Résultat : le para athlétisme offre aujourd’hui une palette très riche d’épreuves. Wilfried Krantz, entraineur national des sauts à la Fédération française Handisport (2020-2023) et entraineur de la para athlète Manon Genest (catégorie T37, saut en longueur) nous aide à y voir clair.

Athlé handisport, para athlétisme... De quoi parle-t-on ?

Commençons par une question de vocabulaire… « Athlétisme handisport » ou « para athlétisme », c’est la même chose ? La réponse est oui ! Les deux expressions sont valables. En fait, le para athlétisme est un terme issu du monde anglosaxon, tandis qu’en France on parle plutôt d’athlétisme handisport.

Petite histoire du para athlétisme

L’athlétisme handisport est relativement jeune, puisqu’il est né au XXème siècle. À l’origine, ce sont les personnes sourdes qui se sont organisées pour pouvoir pratiquer malgré leur handicap. C’est en 1918 que nait en France la première organisation para sportive : la Fédération Sportive des Sourds-Muets de France (FSSMF). En 1924, les premiers Jeux mondiaux des Sourds sont organisés à Paris.

Il faut attendre les années 1950 pour que se développent les épreuves en fauteuil roulant. En 1954, l’ancêtre de la Fédération française Handisport voit le jour. Elle s’appelle alors l’Association des Mutilés de France.

Autre date clé de l’histoire du mouvement handisport : 1960. C’est l’année des tout premiers Jeux paralympiques ! Organisés à Rome, ils réunissent 23 nations et 400 athlètes, exclusivement en fauteuil roulant. On compte alors huit sports : para athlétisme, basket fauteuil, para natation, para tennis de table, para tir à l’arc, billard, dartchery (un mix de tir à l’arc et de fléchettes) et escrime fauteuil.

Quelle fédération pour les para athlètes ?

En 1963, l’Association des Mutilés de France devient la Fédération Française Sportive des Handicapés Physiques (FFSHP), puis change de nom une nouvelle fois en 1977 pour devenir la Fédération Française Handisport (FFH), sa dénomination actuelle.

A la différence des valides, où chaque sport à sa propre fédération (football, basket, athlétisme, etc.), les para sportif.ves sont réunis au sein d’une seule grande fédé. Celle-ci s’organise en commissions sportives. Les para athlètes dépendent donc de la commission Athlétisme au sein de la Fédération française Handisport.

Quelles sont les disciplines sportives représentées au sein de la Fédération française handisport ?

Bonne nouvelle : plus d’une trentaine de sports adaptés aux différents handicaps sont représentés au sein de la Fédération française Handisport.

Les sports de ballon : volley-ball sourds, futsal, goalball et torball (jeux consistant à lancer un ballon sonore à la main au ras du sol pour inscrire un but), handball sourds, football sourds, foot fauteuil électrique, cécifoot (foot à 5 pour les déficients visuels) et rugby fauteuil.

Les sports de raquette : tennis, tennis de table, badminton sourds, Showdown (qui s’inspire du tennis de table et du air hockey).

Les jeux de boules : boules et pétanque sourds, bowling sourds et Boccia (qui s’apparente à de la pétanque jouée en intérieur avec des balles en cuir).

Le tir : tir sportif, tir à l’arc et sarbacane.

Les sports de glisse : ski alpin, ski nordique et snowboard.

Mais aussi… l’athlétisme, donc, le cyclisme, la natation, le judo, l’escrime, l’équitation, la voile, la randonnée, la danse ou encore le canoé-kayak.

Courses handisport : comment ça se passe, sur le terrain ?

200m, 400m... Quelles sont les épreuves du para athlétisme ?

On retrouve dans le para athlétisme…

- Toutes les courses sur piste à l’exception des courses de haies : sprints (100 m, 200 m, 400 m) ; courses moyennes distances (800 m, 1 500 m) ; courses longues distances (5 000m, 10 000m) ; course de relais (4×100 m).

- Tous les sauts à l’exception de la perche : saut en hauteur, saut en longueur, triple saut.

- Tous les lancers à l’exception du marteau : disque, poids, massue et javelot.

- Toutes les courses sur route :
marathon, semi-marathon et 10 km.

Les catégories et règles du para athlétisme

Il existe deux grands ensembles de pratique dans l’athlétisme Handisport.

- La pratique débout pour les athlètes en capacité de courir debout (avec possibilité d’utiliser des prothèses).

- La pratique en fauteuil pour les athlètes qui, pour cause de déficience physique, n’ont pas la possibilité de courir debout.

Côté règles, c’est grosso modo la même chose que pour les athlètes valides. Des variations existent cependant pour adapter les disciplines aux spécificités des handicaps. Quelques exemples :

- lancers : le poids des engins de lancer est allégé, car les lancers se font depuis des chaises. De plus, un engin est ajouté, qui n’existe pas chez les valides : la massue (en bois).

- sprint et déficience visuelle (T11/12) : pour le 100 m et le 400 m, on ne retrouve que 4 para athlètes en finale. Les para athlètes sont effet accompagnés de guides. Chaque duo utilise donc deux des huit couloirs disponibles.

Quels sont les records historiques en athlétisme handisport ?

C’est le privilège des sports encore jeunes… : dans le para athlétisme, les records tombent comme des petits pains ! À chaque grande compétition, le spectacle et l’histoire sont donc au rendez-vous.

Il serait évidemment long de citer tous les records handisport, mais on peut évoquer par exemple ceux de Markus Rehm, l’un des grands champions du para athlétisme contemporain. L’athlète allemand est un spécialiste du saut en longueur dans la catégorie T64 (prothèse de membres inférieurs). En 2014, il est devenu le tout premier para athlète à décrocher un titre national chez les valides. Markus Rehm a battu à plusieurs reprises le record du monde du saut en longueur en T64. Sa meilleure marque : 8,72 m.

Jason Smyth est un autre para athlète légendaire. A Londres, aux Jeux paralympiques de 2012, l’Irlandais est devenu l'athlète handisport le plus rapide de l'histoire en finale du 100 m T13 (malvoyants), avec un record du monde de 10,46 secondes.

Citons aussi Fleur Jong. Cette para athlète des Pays-Bas est la grande patronne du saut en longueur féminin T64. Championne paralympique en 2020, elle détient le record du monde avec un saut de 6,16 m. Polyvalente, elle détient aussi depuis mai 2023 le record du monde du 100 mètres T62, avec un chrono de 12,40 secondes.

La France aussi a ses champions handisport. Comme Timothée Adolphe, surnommé le « guépard blanc », et spécialiste du sprint en catégorie T11 (cécité). Six fois champion d'Europe, champion du monde du 400 m en 2019 à Dubaï et vice-champion paralympique à Tokyo en 2020, il détient la meilleure performance mondiale du 60m indoor.

Déficience visuelle, prothèse, handicap mental... Les classifications du para athlétisme

C'est quoi, un handicap T38, T20, T13 ?

En para athlétisme, les athlètes se classent dans différentes catégories en fonction de leur handicap et du degré de ce handicap. Un code composé d’une lettre et de deux chiffres permet de reconnaitre chaque catégorie.

La lettre désigne le type d’épreuve :

- T comme « track » en anglais, pour les épreuves sur piste (courses et sauts)

- F comme « field », pour les épreuves sur terrain (lancer).

Le premier chiffre désigne le type de handicap :

- 1 : déficience visuelle 

- 2 : déficience intellectuelle

- 3 : lésion cérébrale

- 4 : petite taille ou problèmes orthopédiques

- 5 : paralysie ou amputation en fauteuil

- 6 : prothèse de membres inférieurs.

Le second chiffre désigne le degré de handicap :

- de 1 : degré le plus haut du handicap…

- … à 8 : degré le plus faible du handicap.

Certaines catégories ne vont pas jusqu'à 8. Pour la déficience visuelle par exemple, il y a trois degrés de handicap : F/T11 (non-voyants), FT/12 et FT/13 (malvoyants). La déficience intellectuelle, elle, ne comprend pas de degré.

Voici les catégories précises existantes :

T/F 11 à 13 : déficiences visuelles,
T/F 20 : déficiences intellectuelles,
T/F 31 à 34 : déficiences d’origine cérébrale (courses/lancers en fauteuil),
T/F 35 à 38 : déficiences d’origine cérébrale (courses/lancers debout),
T/F 40 à 41 : personnes de petite taille,
T/F 42 à 47 : amputations ou assimilés,
T/F 51 à 54 : personnes atteintes de la moelle épinière et assimilées (courses fauteuils),
T/F 51 à 57 : personnes atteintes de la moelle épinière et assimilées (lancers assis),
T/F 60 : déficiences auditives,
T/F 61 à 64 : athlètes appareillés de membre(s) inférieur(s).

Comment s'entrainent les para athlètes ?

« Il s’agit de s’adapter à chaque athlète pour trouver, selon le handicap et son degré, des solutions concrètes pour la pratique, l’entrainement et la compétition », explique l’entraineur Wilfried Krantz. « Les contenus sont souvent les mêmes que pour les valides, mais avec des précautions supplémentaires. Par exemple pour limiter la dangerosité des exercices et le risque d’accident avec les équipements ».

Une grande différence, toutefois : « Les entrainements ont une dimension souvent plus technologique », témoigne Wilfried Krantz, « On ne travaille pas seulement le corps humain, mais aussi sa symbiose avec les équipements techniques : fauteuil ou prothèses, notamment ». Dans le cas d’un athlète avec prothèse de tibia ou de fémur (les fameuses lames), « le corps doit fusionner avec la matière, en l’occurrence le carbone. Une partie de l’entrainement est donc consacrée à cette expérimentation sur l’équipement. »

les spécificités du fauteuil des athlètes handisport

Le fauteuil de course est un équipement essentiel de l’athlé handisport. Au fil des années, il s’est beaucoup perfectionné. Il s’est allégé grâce à l’aluminium et au carbone. Aujourd’hui, les fauteuils d’athlétisme pèsent entre 10 et 25 kg. Il est aussi passé à trois roues : deux roues arrière dotées d’une main courante pour la propulsion manuelle et une roue avant pour donner la direction. L’assise, quant à elle, est soit rigide, soit en toile. Un autre élément clé du fauteuil handisport est le « steering », ou compensateur de courbe : il permet au para athlète de progresser en ligne droite ou de prendre ses virages sans devoir tenir le guidon

🎧 À écouter en podcast sur Conseil Sport

Le déclic de Dimitri Jozwicki : “Mon handicap ne me définit pas”

Dimitri Jozwicki et l’invité du Déclic. Athlète paralympique en paraathlétisme, il est sprinteur sur 100 mètres.

Dans l’épisode de cette semaine, il nous parle de sa vie de sportif, de la découverte de son handicap mais aussi, de ses engagements.

Alors, prêt·e à vous lancer sur les pistes d'athlé ?

Benjamin

Journaliste & rédacteur

Quand je ne suis pas assis à écrire sur l’actualité ou sur le sport, je m’en vais lutter contre ma propre sédentarité grâce au vélo (musculaire !), à la rando (urbaine) et au badminton (en double, c’est plus marrant et un peu moins fatigant).

Vous aimerez aussi :

Erin Clark et la place du handicap dans le milieu du sport artistique

Pole danseuse, adepte du tissu aérien et de la corde à grimper, l’athlète compte un beau palmarès à son actif dans ces disciplines.

Jonathan Hivernat : “Le rugby fauteuil, c’est mon mode de vie"

À 32 ans, Jonathan Hivernat cumule déjà un palmarès sportif bien fourni. Son sport de prédilection ? Le rugby fauteuil !

conseils-le-rugby-fauteuil-cest-quoi

Le rugby fauteuil, c'est quoi ?

Le rugby fauteuil est un sport d'impact qui reprend le code de plusieurs sports collectifs. Découvrez les règles du jeu et le témoignage de Steeve, ancien joueur de l'équipe de France de Rugby fauteuil en 2012.

marche nordique

Qu’est-ce que le sport adapté ? (et pourquoi en faire ?)

Parfois attirantes mais compliquées, les activités physiques et sportives sont pourtant accessibles aux personnes en situation de handicap mental ou physique. Et si on essayait ?