La cloche sonne, place au cours de sport ! Les souvenirs, bons ou mauvais, vous reviennent quand vous y repensez ? Est-ce possible d'aimer le sport quand l'éducation physique n'était pas votre tasse de thé ?
Entre la course de fond, le saut de cheval et l’odeur de vieilles chaussettes des vestiaires à l’adolescence, le sport à l’école n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. D’ailleurs, quand j’en ai parlé à mes collègues, ce sujet à tout de suite libéré la parole. S'est ensuivi une demi-heure de racontage d’histoires. Et paf ! J’avais mon article.
Vous lirez ici les histoires ordinaires de Simon, Marion, Gabrielle, Bérangère, Céciliane et moi-même. [À ne pas prendre pour argent comptant, ce sont des récits d’antan, genre les années 90-2000] On vous lâche le doss’ et on claque la porte. Puis, on part à la découverte de sportif·ves qui s’ignorent et de l’amour du sport. Promis, on a commencé le sport à l’école sur les rotules, mais ça se termine bien !
Oui, j’ai écrit “mi-figue, mi-raisin”, et quoi ? Cette expression, bien que désuète, décrit parfaitement les témoignages reçus de mes collègues, en réponse à la question : “Concrètement, vous en retenez quoi, du sport à l’école ?”. “L'enfer sur Terre” - “mitigé” - “vraiment nul” - “Entre bof et trop bien” - “sans commentaires” ou encore "ma matière préférée". Il y a autant de vécus que d’écolier·ère·s, semble-t-il.
Asthmatique depuis ma tendre enfance, j'ai, pour ma part, toujours vécu le sport comme une punition. Je me souviens encore des courses de cross où tous les collèges de ma ville se réunissaient comme une grande famille, pour courir dans la boue du parc St Crépin. J’avais beau partir en première ligne… Je finissais toujours dernière… à marcher, bronchodilatateur à la main. C’est plus ou moins le portrait de toutes mes expériences sportives. Franchement, niveau cohésion, gain de confiance et fierté, ce n'est pas à ce moment-là de ma vie que le sport a été d’un grand soutien.
Vous visualisez les tours de pistes “dans la brume matinale” ? Bérangère a peu ou prou vécu les mêmes traumas que moi. Elle a détesté “le test qui fait "bip bip" (mais si, quand tu dois courir et arriver avant le bip. Et le rythme s'accèlere...)*, et le fait d’être nulle au tennis de table et de rester dans les dernières tables”.
Pour Céciliane, ce sont de tout autres sensations : “Je n’avais pas de tours de piste mais des sports qu’on pouvait pratiquer dans la cour, sous le préau ou dans un gymnase. Évidemment que le hockey ou le tennis de table n’ont pas été mes plus belles découvertes sportives, mais ce que je retiens, c’est que c’était un moment où je pouvais bouger mon corps, m’exprimer, rire… Des choses qu’on ne pouvait pas faire dans les autres matières.”
Marion et Gabrielle gardent également de très bons souvenirs : “C'était parfois comme une récréation, en beaucoup plus long [Marion]”. “J'ai pu tester plusieurs sports comme le patin à glace, comme j'ai fait ma scolarité dans plusieurs pays.” [Gabrielle]
Je me souviens des cours de step et d’escalade au lycée qui rassemblaient tous les ingrédients pour passer un bon moment. Il y avait de la musique, ce n’étaient pas des sports collectifs et on n’avait pas besoin d’un niveau déjà avancé pour apprécier le moment. Majoritairement, tout le monde était logé à la même enseigne.
Oser, essayer, persévérer, ce sont des concepts qui s’apprennent et le sport peut être une magnifique porte ouverte à cela. Si seulement on avait su…
*le test VMA léger-boucher
Comme pour toutes les matières, avoir un bon prof peut être un incroyable levier pour apprendre à aimer le sport. À l’inverse, un·e professeur·e peu à l’écoute des besoins de ses élèves peut ruiner cette expérience. Ce n’est pourtant pas une fin en soi.
Imaginez ainsi Marion, alors âgée de 12 ans, en plein cours de natation. Marion, elle adore le sport et franchement, elle donne tout ce qu’elle a. Malgré tout, elle garde une appréhension face à l’épreuve du plongeoir. Ce n'est pas inné de sauter de si haut en fait. C’était sans compter sur sa professeure aux méthodes assez douteuses : “allez on y va, c’est pas le moment de réfléchir”. Vous voyez le genre ?
Bref, Marion est sur son plongeoir au-dessus du grand bassin, terrorisée et sa professeure, excédée, arrive derrière elle et la pousse. Bon, après plusieurs vacances chez les cousins qui ont une piscine et une centaine de “bombes” sur le plongeoir, Marion s’est presque réconciliée avec la natation. Le secret ne serait-il pas le plaisir ?
Gabrielle l’explique très bien, la motivation des professereur·es compte beaucoup dans l’appréciation du sport en milieu scolaire : “J'ai eu LE prof de sport au lycée qui me motivait, me poussait à croire en moi et qui faisait même du sport avec la classe (faut le dire un prof de sport qui fait du sport pendant les cours c'était plutôt rare).”
On ne peut pas passer à côté de ce sujet tabou. Lorsque j’ai demandé un mauvais souvenir du sport à l’école, le sujet du vestiaire est sans doute celui qui est le plus revenu sur le tapis. “se changer dans les vestiaires collectifs à la piscine.”, “le moment des vestiaires”, “les conversations dans les vestiaires”... Ce doit être l’un des moments les plus vulnérables de notre passage à l’école, et on s’en souvient.
“Ce moment où, dans les vestiaires, tout le monde se toise, les moqueries ne manquent pas dès lors qu'on a un physique un peu trop fort ou maigre. C'est difficile, car c'est un moment de la vie où on se construit, où on a besoin de repères et de confiance en soi. Je devais me donner encore plus que les autres pour mériter un peu de respect, et je crois que c'est ce qui fait, au départ, que je faisais énormément de sport”, raconte Simon.
Comme pour beaucoup de jeunes filles, Gabrielle l’a aussi ressenti : “j'ai vécu la “bienveillance” des discussions de vestiaires. Ma puberté se faisait tarder par rapport aux copines de mon âge, j'étais complexée de ne pas avoir de poitrine, d'être très fine, et la peste du collège (il y en a toujours une) se faisait un malin plaisir de me ridiculiser devant tout le monde.” La violence de ces discussions/moments marque, même si l’on gagne en maturité en grandissant/viellissant.
Pour Marion, “Il faudrait peut-être travailler en parallèle sur une éducation "civique" et aborder les questions de genre, de sexualité, les thématiques de harcèlement, de racisme, de grossophobie... Les cours de sport étant souvent une mini représentation de toutes les agressions que l'on peut subir dans la vie.”
Avec Céciliane, le passage dans les vestiaires est devenu une véritable routine : “Les vestiaires ? Aucun mauvais souvenir, je connaissais depuis mes 6 ans les vestiaires du club de gymnastique. Je pense que c’était devenu une habitude de me déshabiller avec d’autres filles, j’avais même des astuces pour me changer sans trop me dénuder. Je n’avais, à l’époque, quasi aucun complexe.”
Je vous l’avais dit, l’histoire se termine bien ! De mon côté, les années sont passées et j’ai appris à regarder le sport autrement. J’ai commencé par la randonnée, j’ai associé sport et plaisir juste à ce moment-là. Quand on arrive au bout de la rando, hyper fier·ere·s, on a souvent un peu mal partout, mais la récompense est immense. On a atteint notre objectif et ça, c’est toujours incroyable.
Pour mes acolytes, c’est pareil ! À partir du moment où le sport est associé au plaisir, la magie opère. Bérangère a commencé à courir pour travailler son souffle : “Depuis, je fais du vélo tous les jours, j'ai fait Lille-Hardelot (160 km en 1 jour), deux fois, j'ai pris des cours de natation, j'ai même fait un triathlon. Surtout, j'essaye d'inculquer à mes enfants quelques valeurs liées à l'activité physique, de faire en sorte qu'elles prennent du plaisir à pédaler, nager, danse, courir... Notamment parce que je ne leur souhaite pas mon parcours et mon rapport douloureux au sport.”
Le sport est un support au quotidien pour Simon : “Si je ne fais pas de sport je suis de mauvaise humeur, stressé, je dors mal, j'ai plus de mal à me concentrer. C’est toujours un bon moment, loin des écrans, loin des tracas !” Les souvenirs de l’école sont derrière nous : “Aujourd'hui, je fais mon sport sans pression et sans peur du jugement des autres. Je sais que je le fais pour mon bien-être physique et mental et je ne pourrai pas m'en passer.” souligne Gabrielle.
Enfin, la plupart d’entre nous faisons du sport au quotidien avec beaucoup de plaisir parce que nous avons saisi les bienfaits d’une activité physique sur notre corps et notre esprit. On casse les barrières des contraintes sportives : “J'ose davantage tester de nouvelles choses, et j'ai pris conscience qu'il existait plein d'activités sportives que je faisais sans m'en rendre compte : marcher, randonner, faire du vélo... Le sport au quotidien est possible finalement.” nous raconte Marion. Pour certaine comme Céciliane, c’est même devenu un métier !
De fait, je me demande si une meilleure communication sur les bienfaits du sport et un meilleur accompagnement des élèves ne m’auraient pas aidée un chouia 🤏à apprécier davantage le sport à l’école… L’important, c'est de m’être réconcilié maintenant et de pouvoir profiter de tout ce que le sport peut offrir…
Clap de fin donc pour nos souvenirs sportifs à l’école, place désormais au plaisir d’un sport choisie pour notre bon plaisir, et pour tous les bienfaits qu’une activité physique régulière peut nous apporter. Mon sport, mes choix, et de nouveaux souvenirs joyeux, en veux-tu, en voilà !