Perte de poids et mouvement body positive : une histoire de désamour ?
Non, vouloir perdre du poids ne fait pas de vous des traitres à la cause body positive, et le GIGN ne débarquera pas dans votre cuisine pour saccager votre salade de fruits.
“Je pense qu’il faut d’abord se poser la question : ‘Pourquoi est-ce que je veux perdre du poids ?’”, souligne Laetitia Reboulleau, “Est-ce pour des raisons de santé, ou pour une autre raison en réalité ?” En demandant à des personnes concernées, on se rend bien vite compte qu’il ne s’agit pas uniquement de santé, mais bien de place dans la société. “Quand on creuse, on nous répond que c’est aussi pour ne plus avoir de difficulté à trouver sa taille de vêtement en magasin, pour ne plus se sentir serré.e sur une chaise, ou pour ne plus subir le poids du regard d’autrui”, souligne l’experte. Au-delà de la santé, c’est peut-être aussi pour se débarrasser de la charge mentale pesant sur les personnes en surpoids que nombre d’entre elles cherchent à perdre du poids.
Globalement, c’est à toutes les strates de la société de faire l’effort de changer de regard sur la diversité des corps. “La grossophobie est encore fort présente dans tous les milieux. Tout est fait pour empêcher les personnes grosses de s’épanouir”, souligne Laetitia Reboulleau, “On pense encore que l’humiliation est le meilleur déclic pour pousser quelqu’un à maigrir, et ça n’avancera pas tant que le discours médical ne changera pas, et ne rappellera pas que les régimes express et à répétition n’ont rien de sain”. À la télévision, on se rappelle ainsi d’émissions centrées sur la perte de poids, en France comme ailleurs. "'The biggest loser' aux États-Unis met ainsi au défi des personnes obèses à perdre 10% de leur masse corporelle en un mois, ce qui est extrêmement dangereux pour le corps, en plus d’être contre-productif”, explique l’experte, “En France, cela n’avancera pas tant que les magazines féminins garderont les fesses entre deux chaises comme ils le font actuellement : sur la même couverture, tu peux avoir le nouveau régime en vogue, et à côté une interview de star body-positive…” Pas facile de s’y retrouver, en effet !
“Je ne pars pas du principe que les personnes qui souhaitent perdre du poids trahissent le mouvement body positive”, explique Laetitia Reboulleau, “En revanche, il faut se rappeler que si tu opères une perte de poids, c’est que tu n’acceptes pas ton corps tel qu’il est”. Aucune obligation ici à s’aimer, puisque le mouvement body positive s’oppose aux injonctions, mais bien une invitation à repenser la façon dont cette perte de poids va être présentée aux proches et sur les réseaux sociaux. “Je n’ai rien contre les personnes qui font des régimes, en revanche, j’ai un problème avec les personnes qui affichent des photos avant/après en mode ‘regardez comme je suis plus belle, épanouie, heureuse’”, détaille la journaliste, “Ça sert d’argument aux personnes grossophobes qui nous disent à nous, personnes concernées : ‘regarde, elle dit qu’elle était malheureuse quand elle était grosse, donc toi, tu ne peux pas te sentir bien dans ton corps, tu mens’”.
“Si tu te sens si bien dans ton corps après une perte de poids, pourquoi as-tu besoin de comparer publiquement ce corps à ton physique précédent ?”, questionne ensuite Laetitia.