Promis, on y a longuement réfléchi, mais voilà, c’est dit : les régimes tels qu’on les connaît, nous, on n’y croit pas vraiment (pas du tout, même).
La perte de poids est un sujet infiniment personnel, et mille raisons peuvent pousser tout un chacun à se lancer dans ce projet. Pourtant, dans une société où le régime est roi, on oublie parfois les limites sérieuses de son pouvoir et de sa légitimité. C’est d’ailleurs ce dont parle la dernière vidéo Youtube du créateur de contenu Johan Papz, à visionner ici.
“Certain.es se lancent dans un régime parce qu’ils et elles ont associé la minceur à la beauté”, souligne Anne-Laure Laratte, diététicienne, “la pression sociale, les proches, les magazines, le summer body, l’inaccessibilité des grandes tailles en magasin… Tout ça participe à la culture du régime”. Difficile donc d’échapper à cette injonction à la minceur lorsque l’on ne rentre pas dans les normes imposées.
Lorsque l’on recherche le mot “régime” sur Internet, c’est tout un monde qui s’offre à nous. Prenons un exemple probant : le régime dit “monodiète”. Mais si, si, ce fameux régime à aliment unique ! Choux, pommes, bananes, riz… Les aliments recommandés sont variés, mais vous ne devrez en choisir qu’un seul en guise de régime alimentaire sur un jour, une semaine, un mois ou plus. Le problème ? Ce régime met en danger votre équilibre alimentaire puisqu’il vous prive de certains apports capitaux pour votre santé, et perturbe le bon fonctionnement de votre organisme. Alors oui, la perte de poids sera certainement au rendez-vous, mais elle s’accompagnera vraisemblablement d’une grande frustration tout au long de votre régime et d’une reprise de poids rapide par la suite.
Johan Papz, créateur de contenu sur Youtube, s’est confié à ce sujet sur sa chaine dimanche 16 octobre 2022, dans une vidéo intitulée “Le régime qui a détruit mon corps et ma santé”. Il y explique avoir opté pour un régime cétogène, et avoir prolongé l’expérience pendant près de dix mois. C’est un regard sur son vécu plein de recul que le créateur partage ici, une sensibilisation salvatrice et nécessaire, auprès d’une communauté de plus d’un million de personnes. Troubles du comportement alimentaire, malaises et difficile appréciation de son corps ont été au rendez-vous.
Mais alors, pourquoi se lance-t-on dans ces régimes ? “L’industrie des régimes pèse lourd : plusieurs milliards de dollars chaque année”, précise Anne-Laure, “ils ont réussi à faire croire que le régime sous sa forme la plus connue (donc temporaire et hypocalorique, avec perte de poids rapide) est un processus normal à réitérer chaque année, et que le poids se contrôle”. Spoiler : non, le poids de forme ne se contrôle pas, et peut être lié à des facteurs génétiques ou médicaux.
Qui plus est, derrière les grandes promesses de ces régimes hypocaloriques se cachent déboires et menaces pour votre santé.
“Ces régimes connaissent une sérieuse notoriété parce qu’effectivement, ils sont efficaces sur le court terme”, explique Anne-Laure, “dans l’imaginaire collectif, si c’est efficace, même momentanément, c’est que ça marche, et si ça marche, alors on en parle, et on participe à leur popularité”. Le hic, la tuile, le cheveu dans la soupe au chou oserais-je même, c’est que ces régimes n’ont rien d’efficace sur le long terme, et présentent même un risque médico-psychologique. “La plupart de ces régimes sont dits hypocaloriques : à 1200, 1800 calories par jour, sans féculent ou hyper-protéinés selon les cas”, détaille l’experte. Tout dépend de l’activité physique et du métabolisme de base, mais les besoins journaliers des femmes tournent plutôt autour de 2000 kilocalories, et 2400-2700 pour un homme. “Dans un régime hypocalorique, on perd donc très vite au début, et on pense perdre de la masse grasse, mais pas du tout”, précise Anne-Laure, “en réalité, c’est la masse musculaire qui se dégrade”.
Et ça ne s’arrête pas là, puisque faute de carburant, votre corps va diminuer son métabolisme pour pallier ce manque d’énergie. “Il se met en mode économie d’énergie, le poids se stabilise et c’est là que l’on perd notre motivation, nos capacités sportives, et le moral par la même occasion”, illustre Anne-Laure, “et comme le régime n’est pas tenable à moyen et long terme, on va reprendre tout le poids perdu”. Plus encore, même, puisqu’on constate une augmentation du poids de forme année après année, du fait de ces périodes de privation. Un véritable bingo de la déception.
Ça ne vous parait pas très clair ? On vous explique. Disons que vous faites 65 kg, et que vous perdez 7 kg au cours de votre régime miracle. Les mois passent, vous reprenez une alimentation normale et à l’approche de l’été, sous la pression du bikini body (oui, nous aussi, on trouve ça nul), vous remontez sur la balance. Là, c’est la déception : non seulement vous avez repris tous les kilogrammes perdus, mais d’autres sont venus s’ajouter au décompte final, alors même que votre alimentation se trouve être identique à celle que vous aviez pré-régime.
Eh oui, après cette phase de privation, les adipocytes (ndlr : cellules destinées au stockage des graisses) vont se remplir à nouveau. Une fois au maximum de leur potentialité, des néo-adipocytes vont se créer, et stocker encore davantage de lipides. En d’autres termes, votre corps fait des réserves pour répondre à l’état de privation dans lequel vous l’avez plongé au cours de votre régime. Le souci, c’est que ces cellules ne vont pas disparaitre, auront de grandes difficultés à se vider lors de votre prochain régime, et seront responsables de l’augmentation de votre poids de forme.
De fait, votre poids de forme est passé de 65 kg à 67, 69 kg ou au-delà. La tentation sera de refaire un régime pour perdre à nouveau ces kilogrammes, mais c’est en réalité un piège. Pour revenir à votre poids de fin de régime, il vous faudra redoubler d’efforts, pour reprendre au final sans doute la totalité des kilos perdus après votre second régime. C’est ce que l’on appelle “l’effet yo-yo”, boosté par la privation infligée au corps : on perd, on reprend davantage, puis on reperd (mais moins), et on reprend encore.
Contrairement à ce que l’on peut penser, un régime ne s’effectue pas par la seule volonté. En effet, en vous lançant sur les montagnes russes des régimes sans la sécurité d’un solide encadrement médical, c’est votre santé que vous mettez à risque. À quoi bon perdre du poids, si c’est pour infliger des carences aux conséquences néfastes à votre corps ?
De fait, pour s’éviter bien des déceptions et l’effet yo-yo par la même occasion, un encadrement médical est fortement recommandé dans le cadre d’un processus de perte de poids.
C’est le poids dans lequel vous vous sentez le mieux, qui reste stable sans difficulté, au top de vos capacités et de votre forme. Sauf exception médicale, c’est le poids auquel votre corps se stabilise lorsqu’il reçoit l’apport calorique journalier nécessaire selon votre pratique sportive. Il peut varier en fonction de votre âge, de votre condition physique, de votre pratique sportive, de facteurs génétiques… Bref, à chacun.e son poids de forme, et le mieux pour calculer le vôtre sera de vous tourner vers un.e professionnel.le de santé et/ou de la nutrition à même de vous aider à rétablir un mode de vie vertueux et équilibré.
Avant même de constater un impact psychologique sur ses patient.es post régime, Anne-Laure alerte sur les croyances inculquées par la diet culture (ndlr : la culture du régime, promue dans les magazines, les publicités, sur les réseaux sociaux…). “La diabolisation des féculents fait partie des fausses croyances alimentaires développées par les régimes”, explique l’experte, “ces croyances entrainent une frustration due aux privations qu’elles imposent”. Pas de croissants, “parce que ça fait grossir”, pas de fromage le soir, pas de pain, pas de pâtes non plus, etc. Une vie sans pâtes, riz, semoule, qu’ils soient sans gluten ou non… Vous imaginez ? Non ? Moi non plus, et je m’y refuse. L’enfer attendra, et les régimes également. Seulement voilà, dans les filets de la diet culture sont prises de nombreuses personnes, condamnées à vous voir manger ce qu’elles s’interdisent et à subir la frustration générée par ce spectacle.
“On nous répète que dans un régime, tout est question de volonté”, pointe Anne-Laure, “donc inconsciemment ou non, lorsque l’on craque et que l’on ne parvient pas à perdre durablement du poids, on se dit que le problème, c’est nous, que l’on est nul.le, et ça nous atteint psychologiquement”. Avoir plus faim que la normale, craquer sur des aliments vus comme interdits, prendre du poids malgré les efforts… Autant de choses qui peuvent participer à la construction d’une mésestime de soi.
De ces déceptions peuvent découler d’autres effets néfastes : compensation par une pratique sportive excessive, installation d’un comportement alimentaire troublé, et dans les cas les plus poussés, apparition de troubles du comportement alimentaire au sens clinique du terme (boulimie, anorexie, orthorexie…).
Alors quoi, alimentation saine et plaisir ne peuvent pas aller de pair ? Et la perte de poids ne peut-elle pas se faire dans un cadre sain ?
“Je ne vais jamais mettre l’accent sur la perte de poids avec mes patient.es”, explique Anne-Laure, “on va revoir l’alimentation sous le prisme du corps et de ses besoins et envies pour réduire le risque de pathologie”. Revoir les bases de la nutrition, comprendre le contenu d’une assiette et redonner leur place aux aliments, apprendre à cuisiner de manière équilibrée et variée, voilà ce sur quoi travaille l’experte avec les personnes qu’elle accueille dans son cabinet. “On cherche un rapport plaisir et santé au sport et à l’alimentation”, souligne la diététicienne, “s’il y a une perte de poids qui en découle, tant mieux, mais s’il n’y en a pas, c’est peut-être que cette personne était déjà à son poids de forme, et qu’il faudra travailler sur son rapport à celui-ci“.
Un rapport “sain” à l’alimentation et au sport, en voilà un vaste programme pour certain.es face aux fortes croyances restrictives inculquées par la diet culture. “Ces croyances sont tellement ancrées, que je me retrouve parfois face à des patient.es qui sortent en colère de mon cabinet parce que je ne leur ai pas interdit leur pâtisserie du dimanche”, note Anne-Laure. Bannir des aliments plaisir et aller à la salle tous les jours vous fera certes perdre du poids, mais cela peut, sur le long terme, vous occasionner bien des douleurs, et vous faire glisser entre autres vers la bigorexie (“la quoi ?” La bigorexie, on vous en parle juste ici).
Votre corps est une sacrée machine, qui nécessite un carburant aux apports variés, un peu de repos pour assurer son entretien et du plaisir pour garder le sourire. Sans cela, vous ne pourrez en apprécier les pleines capacités. Franchement, ce serait dommage, non ? On n’a qu’un seul corps, autant apprendre à l’aimer. Et même si cela semble plus facile à dire qu’à faire, la difficulté du chemin vaut vraiment le bonheur d’un corps aimé à sa juste valeur.
La question n’est pas tant “quand”, mais plutôt “comment”. À chacun.e son rythme, sa progression sportive et ses préférences.
Au début, dans le cadre d’un processus de perte de poids, on connait bien souvent un pic de motivation. On a envie d’aller à la salle tous les jours, de transpirer comme jamais, et de ressortir rouge de fierté de sa séance. Premièrement, si vous ne donnez pas le temps à votre corps de récupérer entre vos séances, il lui sera difficile de vous délivrer toute l’énergie nécessaire pour affronter votre quotidien et tenir vos objectifs sur le long terme.
Dormir, s’octroyer des journées de repos sans pratique sportive, soigner la récupération, sincèrement, c’est pas mal aussi (et nécessaire). C’est un peu votre éclair au chocolat sportif : vous avez l’impression que ça vous dessert (ahah… Pardon), mais en réalité, ces moments participent à la pérennité de votre bien-être physique et moral. Oui, on le répète, cet éclair au chocolat, cette pâte à tartiner, ou ces délicieuses crêpes participent aussi à l’équilibre de votre alimentation, comme un petit boost au moral dont chacun.e a parfois besoin.
On ne vous dit donc pas de faire du sport à tout prix, mais plutôt de trouver la pratique sportive la mieux adaptée à vos besoins et à vos envies. Voilà qui devrait vous donner la motivation nécessaire pour atteindre vos objectifs santé, et retrouver le plaisir d’une alimentation pleine de vitamines et de tous les apports nécessaires à votre corps.
Eh oui, surprise : on ne croit pas non plus au concept de “cheat meal” (ndlr : ces repas plaisir composés d’aliments d’ordinaire “interdits”) : avec une alimentation équilibrée, vos repas peuvent aussi vous apporter tout le plaisir recherché. Tout est une question d’équilibre et de quantités raisonnées : en vous octroyant le plaisir de ce cookie sur lequel vous lorgnez, vous évitez la frustration, et la boite de cookies décimée un jour de bad mood.
L’alimentation n’est ni une récompense, ni une punition, mais bien votre carburant pour une vie pleine d’énergie et de plaisir. “L’alimentation équilibrée, c’est un véritable mode de vie, pas une période de restriction temporaire infligée chaque année”, conclut Anne-Laure. Bref, offrez à votre corps ce dont il a besoin et envie, dans un bel équilibre, et il saura vous le rendre. Laissez-vous rayonner de santé et de plaisir !