Pollution et sport ne font a priori pas bon ménage. Pourtant, en étant prudent.e, on peut se dégourdir les jambes malgré une qualité de l’air douteuse.
Une longue journée se termine, le besoin de chausser les baskets pour se changer les idées est urgent. Oups, problème, un pic de pollution aux particules fines recouvre la ville. J’y vais ou j’y vais pas ? Dangereux ou pas dangereux ? Voici quelques recommandations de Jean-Philippe Santoni, pneumologue et membre de la Fondation du Souffle, histoire de faire du sport bien informé·e, l’air de rien.
En France, les pics ou épisodes de pollution sont associés à quatre polluants atmosphériques : les particules de tailles inférieures à 10 micromètres (PM10), l’ozone (O3), le dioxyde d’azote (NO2) et le dioxyde de soufre (SO2). En fonction de leurs concentrations croissantes dans l’air, deux niveaux d’actions sont déclenchés par les autorités compétentes :
- Le premier est le niveau d’informations et de recommandations
- Le second est le niveau d’alerte. Il suffit qu’un des quatre polluants dépasse la concentration “limite” d’un des niveaux pour que celui-ci soit déclenché.
Quand on pense pollution de l'air, on pense pics de pollution avec des villes et des campagnes (si si) sous un sombre nuage de particules fines et autres composés organiques volatils. Hummm… Mais on se dit aussi que ces phénomènes sont épisodiques et finalement pas si fréquents. Malheureusement, la réalité en remet une couche.
« Il faut savoir que pour la santé respiratoire en particulier et la santé en général, les effets de la pollution au quotidien – la pollution de fond – issus du trafic routier, des chauffages urbains, du tabac ou encore des émissions agricoles, sont encore plus néfastes que ceux des effets liés aux pics de pollution » nous prévient le Dr Santoni.
Doit-on rester confiné·e chez soi pour autant ? Stopper toute activité sportive pour éviter de s’abîmer les poumons ? Sombrer dans l’incurie ?! Bien sûr que non et voici quelques raisons de se faire du bien en dépit des tourments du ciel.
Oui, faire du sport lors d’un épisode de pollution atmosphérique peut être dangereux puisque cela comporte le risque d’inhaler davantage de polluants.
Mais le Dr Santoni précise : « Toutes les grandes études ont montré que les bénéfices du sport l’emportent sur les risques liés à la pollution. À condition de suivre les précautions suivantes :
- premièrement, faire du sport, dans la mesure du possible, loin des grands axes routiers et privilégier la pratique sportive dans les grands parcs lorsque l’on vit en ville ;
- deuxième précaution, modérer son effort, éviter de faire des efforts sportifs intenses, de façon à ne pas hyperventiler et de moins exposer les poumons. En d'autres termes, cela veut dire que vous devez être en mesure de parler, de chanter ou de tenir une conversation avec une personne à côté de vous ;
- troisième précaution, respirer par le nez, celui-ci est un filtre naturel qui permet de réchauffer et d’humidifier l’air – il filtre une partie des grosses particules ;
- quatrième précaution, essayer de pratiquer le sport très tôt le matin et tard le soir, heures durant lesquelles la pollution est un peu moindre ».
En moyenne, nous respirons 15 000 litres d’air par jour, et beaucoup plus quand on hyperventile en faisant du sport. Avant de sprinter à en perdre haleine, nous devons évaluer et adapter notre pratique pour éviter d’endommager le système respiratoire (larynx, trachée, bronches, poumons).
« La marche sportive, la marche nordique ou le vélo sont préférables à la course à pied lors des épisodes de pollution. Ces sports se pratiquent facilement à une intensité faible à modérée. Ils ne provoquent pas une grosse consommation d’air et vous préservent donc des effets indésirables de la pollution tout en profitant de leurs bienfaits. »
Eh bien non ! En fonction d’une multitude de facteurs (âge, capital santé...), nous ne sommes pas tous·tes égaux·les faces aux effets néfastes de la pollution. Ainsi, en France, le ministère des Solidarités et de la Santé a identifié 3 catégories de personne : la population générale (la majorité d’entre nous), les personnes vulnérables (femme enceinte, nourrisson et jeunes enfants, personnes de plus de 65 ans, personnes souffrant de pathologies cardio-vasculaires ou respiratoires), et les personnes "à risque" (personnes se reconnaissant comme sensibles lors des pics de pollution et/ou les symptômes apparaissent ou sont amplifiés). Les recommandations seront donc différentes en fonction de la catégorie dans laquelle vous vous situez, les personnes vulnérables et "à risque" devant bien sûr particulièrement prêter attention aux précautions.
Avec une atmosphère menaçante, on pourrait avoir l’idée lumineuse de se réfugier dans une salle de sport pour se protéger des effets de la pollution. Eh bien non, ce n’est pas la solution.
« La pollution intérieure est souvent plus élevée que la pollution extérieure, elle peut même être jusqu’à 5 fois plus élevée. Cette pollution, en salle, est générée par les matériaux de construction, les matériaux d’aménagement et le manque d’aération. Cependant, chez certaines personnes asthmatiques, il peut être préférable de faire de l’exercice à l’intérieur car l’air froid et sec, notamment en hiver, peut favoriser les crises. Mais pour la grande majorité des personnes, il vaut mieux faire une activité physique et du sport à l’extérieur plutôt qu’à l’intérieur. »
La Fondation du Souffle est une fondation de recherche reconnue d’utilité publique qui a pour vocation de s’assurer que chacun puisse respirer un air plus sain avec des poumons sains. Elle promeut l’activité physique et le sport dans la prévention des maladies respiratoires et possède trois missions statutaires :
- le financement de la recherche sur les maladies respiratoires ;
- l’aide sociale à des malades en grande précarité ;
- l’information du grand public et la prévention vis-à-vis des maladies respiratoires qui touchent 10 millions de personnes en France (asthme, PBCO, dilatations des bronches, apnées du sommeil).
www.lesouffle.org
Vous avez désormais les cartes en main pour adapter votre pratique sportive aux aléas de la pollution atmosphérique. Avant d’aller vous éprouver, jetez un coup d’œil à l’indice ATMO de votre région, il vous indiquera la qualité de l’air alentour. Cet indice s’échelonne de 1 (excellent) à 10 (exécrable). Et bien évidemment, informez-vous auprès de votre médecin pour savoir si un pic de pollution peut avoir un impact particulier sur votre santé.
N’hésitez pas à nous donner votre avis sur les relations complexes du sport et de la pollution. Nous sommes à l’écoute !