Hier soir, lundi 26 septembre 2022, marquait la sortie de l’édition “Tibo Inshape” de la série Balance Ton Frigo, signée par la créatrice de contenu sportif Juju Fitcats.
Le couple a décidé de partager le contenu de son frigo et de ses placards à leur communauté, dans cette dernière vidéo publiée par Juju Fitcats. L'occasion également de mentionner un trouble du comportement alimentaire parfois rencontré par les sportif.ves : la bigorexie. Anne-Laure Laratte, 29 ans, diététicienne de profession, nous aide à décrypter ce trouble.
Au cours de la vidéo postée lundi 26 septembre, Juju Fitcats lance sur le ton de l’humour à son conjoint, l’influenceur Tibo Inshape : “Toi, le sucre, c’est ton cheval de bataille (...) lui, il a un problème, il est bigorexique”, en réponse à ses réticences face aux aliments sucrés. Mais quel est réellement ce trouble, et quels en sont les signes ?
“La bigorexie, c’est ce trouble via lequel le sport devient prioritaire dans votre vie, jusqu’à empiéter sur votre vie professionnelle et personnelle”, explique Anne-Laure. L’experte donne l’exemple d’une patiente qui choisit de louper le mariage d’un membre de sa famille, car ce déplacement lui ferait manquer des séances de sport. “Le ou la patient.e bigorexique s’impose a minima une séance de sport par jour, et culpabilise si celle-ci est empêchée", note la diététicienne. La recherche de prise de masse, d’un corps athlétique et/ou de performances toujours plus élevées obnubile donc le ou la patient.e jusqu’à envahir son quotidien et impacter sa stabilité psychologique.
Le ou la patient.e se trouve par ailleurs en recherche constante du bien-être procuré par les hormones sécrétées au cours des séances sportives, les endocannabinoïdes et les endorphines. Cette recherche prend donc le pas sur les autres priorités du ou de la patient.e, qui se perd dans les séances de sport pratiquées à outrance.
Le sport tient in fine une place centrale et omniprésente dans la vie des patient.es atteint.es de ce trouble, aux symptômes insidieux et multiples, et aux conséquences bien entendu néfastes physiquement comme psychologiquement.
“Les symptômes sont multiples, et c’est l’accumulation de ceux-ci qui peut nous amener à tirer le signal d’alerte”, souligne Anne-Laure. Parmi ces symptômes, on retrouve les blessures récurrentes dues à une absence de soins pour poursuivre l'entraînement coûte que coûte, la tenue d’une pratique sportive quotidienne, même en état d’épuisement ou en cas de maladie, ou encore la culpabilisation immédiate en cas d’impossibilité de pratiquer sa séance quotidienne.
Côté alimentation, les signaux d’alerte sont également bien présents. “Lorsqu’un.e patient.e me dit se priver de tel ou tel aliment ou groupe d’aliments, comme les sucres, les graisses, les féculents, et me dit ne pas perdre de poids malgré ses séances quotidiennes de sport, ça m’alerte”, confie la diététicienne au contact de personnes souffrant de ce trouble, “certain.es patient.es consomment beaucoup de poudres protéinées, et brûlent toute calorie jugée superflue”.
Je ne vous apprends peut-être rien, mais ça ne coûte pas grand-chose de le rappeler : trop de sport tue le plaisir du sport, et fatigue votre corps parfois jusqu’à l’extrême. Car le corps a ses limites que la bigorexie ignore. En vous rendant à la salle, à la piscine ou dans tout lieu de pratique sportive tous les jours, sans exception, vous privez votre corps du temps nécessaire pour se reposer et reconstruire vos muscles fragilisés par l’exercice. De fait, vous risquez la fracture, l’entorse, la tendinite ou toute autre forme de traumatisme infligé à votre corps.
De plus, c’est l’épuisement mental et physique qui vous guette. La recherche constante de résultats et de performances peut, à terme, générer de nombreuses frustrations en cas d’échec ou de résultats invisibles (ou trop lents à venir à votre goût).
Ce trouble a bien souvent également une incidence sur l’alimentation, étroitement liée à la pratique sportive, et qui classe la bigorexie dans la catégorie des troubles du comportement alimentaire (TCA), au même titre que la boulimie et l’anorexie. Le moindre écart culinaire est souvent suivi d’une sanction auto-infligée par le ou la patient.e, et certains ponts peuvent être faits entre anorexie et bigorexie. “Les patient.es souffrant d’anorexie ont d’ailleurs souvent un rapport au sport proche ou identique aux personnes souffrant de bigorexie”, note Anne-Laure. Seule différence : quand les premier.es recherchent la perte de poids, les autres cherchent la prise de masse ou l’obtention d’un corps athlétique.
Autre point d’alerte, et donc danger pour la santé du ou de la patient.e : les risques de dopage, pour pousser toujours plus loin les performances et résultats corporels. “Le dopage est souvent observé chez les patient.es souffrant de ce trouble, et il faudra alors faire une recherche addictologique pour accompagner également le sevrage de ces substances”, explique Anne-Laure.
S’il n’existe pas de recette miracle aux troubles du comportement alimentaire dans leur ensemble, Anne-Laure conseille aux personnes bigorexiques de se tourner vers des professionnel·les de santé et diététicien·nes à même de “rationaliser la pratique sportive et l’alimentation qui l’accompagne”.
En somme, la diététicienne recommande une thérapie cognitive et comportementale (TCC) pour “comprendre à quoi sert le sport, travailler sur un rapport plus sain à celui-ci, trouver d’autres activités et restaurer un rythme professionnel et personnel où le sport ne tient plus la place centrale et enfin, rationaliser ses pensées et le rôle de la nourriture dans notre vie”. Vaste programme, néanmoins nécessaire pour sortir de ce trouble qui peut isoler socialement autant qu’il vous épuisera.
Face aux TCA, l’accompagnement d’un.e professionnel.le de santé peut grandement vous aider. Votre corps est votre seul vaisseau pour la vie, l’entretenir sainement vous portera loin, tant dans votre vie que dans votre pratique sportive !