Fin de votre séance de sport, c’est l’heure de manger. Salade ou légumes, le choix s'annonce difficile. Stupeur, vous optez pour un kebab. Votre corps va-t-il le regretter ?
Sport ou kebab : faut-il choisir ? On croirait le début d’une dissertation de philosophie tellement la question fait débat. On a fait nos petites recherches et on a demandé l’aide de Matthieu Kordek, expert nutritionniste. Vous savez quoi ? Aujourd’hui est un grand jour, oui oui, on va répondre à cette question et non non, vous n’allez pas être déçu·e.
Un "döner kebab", c’est simple : c’est de la viande (agneau, bœuf, dinde, poulet ou mixte pour les connaisseur·ses), grillée, tournée (döner = tournant en turc) et découpée à la broche, accompagnée de crudités (le plus célèbre trio salade, tomates, oignons). Le tout, servi dans du pain pita avec une sauce au choix (algérienne, harissa, ketchup, mayonnaise…).
Il faut tout de même savoir, et c’est assez cocasse, que le kebab à été inventé dans les années 70 en Allemagne par un turc et que l’autre mot pour désigner un kebab en France, c’est “un grec”. Un repas cosmopolite en soi.
On vient de le voir, la composition du döner kebab n’est en apparence pas si mauvaise. Des ingrédients simples. Pas de quoi affoler notre organisme ! Pourtant, trois éléments sont à prendre en compte lorsque vous dégustez un kebab.
- Le premier c’est la somme de tous les aliments et de la sauce qui fait du kebab un repas trop riche, trop gras et trop salé.
- Le deuxième est son accessibilité. On compte près de 10 000 restaurants kebabs en France. Peu cher, très présent, rapide, le kebab est le choix de la facilité.
- Le troisième, c’est la mauvaise image des restaurants. Notamment dans les kebabs type "fast food".
Une étude de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) - l’acronyme le plus difficile à prononcer - réalisée en 2007 a montré des négligences sur l’hygiène dans 61,5% des restaurants orientaux qui vendent des kebabs.
La standardisation des restaurants kebab type fastfood a favorisé l’utilisation des produits transformés, industriels et souvent de mauvaise qualité. “Avec une viande de mauvaise qualité, le kebab peut avoir des répercussions sur le système digestif, notamment sur la flore intestinale, explique Matthieu Kordek. Les sauces sont également ultra-transformées, comprennent de mauvaises huiles et des additifs pas très sympas pour l’organisme. Le pain souvent industriel, est trop sucré et comprend des additifs. Les frites sont trop grasses et trop salées, ce qui peut avoir une répercussion sur l’hypertension et l’apparition de maladies cardiovasculaires.”
Le kebab en prend un coup. Mais est-ce pour autant la victoire du sport face au kebab ?
Bon, pour l’instant la balance penche plutôt pour le sport et non en faveur du kebab. On s’est sacrifié pour vous : avec Matthieu Kordek, nous avons découpé, analysé (et dégusté) un kebab pour la science. Alors, peut-on dévorer un bon kebab sans craindre pour sa santé ?
Revenons d’abord rapidement sur les fondamentaux de la nutrition, avec notamment les apports et dépenses énergétiques avant de vous donner notre avis.
“Notre corps a besoin d’énergie pour fonctionner, car il en dépense quotidiennement. Cette énergie est générée par ce que nous mangeons”, explique Matthieu Kordek. Elle est quantifiée par un mot que vous aimez détester : les calories. Notre organisme dépense principalement l’énergie (les calories) de trois façons. La première, la dépense journalière (ou NEAT : Non-exercise Activity Thermogenesis), est due à notre activité quotidienne (se rendre au travail, marcher…), la deuxième : la dépense lors d’une activité physique sportive (quand je fais du foot, je cours, je nage…). Et la troisième, liée au métabolisme basal, celle dont le corps a besoin pour fonctionner de base (métabolisme des cellules, des organes, de la digestion : tout cela demande de l’énergie).”
Comme la nutrition n’est pas une science exacte, d’autres éléments comme l’hérédité, le métabolisme, le sexe, l’âge, les hormones entrent en jeu lors des calculs.
Voilà pour les dépenses, concernant l’apport énergétique (ce que nous mangeons, nous buvons), “il va dépendre de la dépense énergétique et de vos objectifs : c’est ce qu’on appelle l’équilibre calorique. Si l’objectif est de perdre du poids, les apports caloriques doivent être inférieurs aux dépenses. Pour maintenir son poids, les apports et les dépenses doivent être à l’équilibre. Enfin, si l’on souhaite prendre du poids, les apports caloriques doivent être supérieurs aux dépenses. C’est la raison pour laquelle le calcul de dépenses énergétiques est très important, et qu’il ne faut pas oublier de facteurs car sinon, l’équilibre sera rompu”.
Vous avez compris le principe simplifié de la nutrition, on peut donc passer à la question que tout le monde se pose : Combien y a-t-il de calories dans un seul kebab ? Que représente un kebab sur le plan de l’apport énergétique ? Pour y répondre, on a donc découpé ce fameux kebab, ses ingrédients et analysé pièce après pièce. On fait durer le suspens… Le kebab représente environ 800 calories, avec les frites et la sauce, c’est 1300 cal. Avec le soda, on monte à 1400 cal. C’est-à-dire, environ 56% de l’Apport Journalier de Référence pour un homme (AJR, selon les recommandations de l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire) et du PNNS 4 (Programme National Nutrition Santé 2019-2023) et 67% pour une femme. Pour un unique repas dans la journée, c'est très important. En comparaison, une pizza représente en moyenne 800 à 1200 calories et un hamburger 400 à 600 calories.
Matthieu Kordek nous rassure : “il est tout à fait possible de manger un kebab en étant sportif. Ce qui est important, c’est surtout la fréquence à laquelle vous allez consommer ce repas, la quantité ainsi que la qualité que vous mangez.”
Si on évite le kebab industriel et ses produits transformés, en lui préférant un kebab artisanal, ce repas peut même présenter certains avantages selon l’expert : “la viande est certes grasse mais s’assimile bien et comprend des protéines animales, importantes dans la récupération musculaire. Si le pain est artisanal avec peu ou pas d’ingrédients ajoutés et d’additifs, il comprend alors de bonnes fibres, permettant la sensation de satiété et la préservation de bonne santé du microbiote (favorisant la bonne digestion). Enfin, concernant les frites, la pomme de terre représente un apport de bons glucides par la présence d’amidon résistant. Il s’agit d’un glucide bénéfique dans la prévention du diabète, qui propose aussi un bon apport en fibres.”
Avant de prévenir : “Même si votre équilibre alimentaire est bon et qu'il répond à vos objectifs, le kebab doit rester occasionnel. À long terme et à forte dose, ce repas peut avoir des conséquences sur votre santé : favoriser l'hypertension, le diabète, l'apparition de maladies cardiovasculaires."
La qualité de la viande va clairement contribuer à rendre ce repas moins calorique. En France, du fait de son faible coût et de sa praticité, la viande surgelée est plébiscitée par les kebabs (95% d’entre eux utilisent de la viande surgelée selon TF1). Pour savoir si la viande est surgelée, observez les broches de kebab : si celles-ci sont lisses et très homogènes avec le haut arrondi, il y a de fortes chances qu’elles soient surgelées et donc de moins bonne qualité. Si vous le pouvez, essayez d’éviter ce genre de restaurants.
Vous l'avez vu, ce qui fait aussi grimper les calories, ce sont les frites, le sel que l'on rajoute, la sauce et la boisson (souvent, un soda très sucré). Alors si vous souhaitez déguster un kebab en rendant le repas moins calorique, limitez la sauce, demandez à ne pas saler les frites et évitez le soda, préférez un bon verre d'eau.
Sinon, la meilleure solution, c'est toujours de faire son kebab soi-même. En cuisinant vous-même, vous pourrez sélectionner les ingrédients et vous aurez la fierté de déguster votre kebab. Conseil de notre expert nutritionniste : “préférez un bon bœuf (ou des pois chiches pour un kebab sans viande), faible en matière grasse, faites votre sauce vous-même (avec du yaourt blanc, du persil, de la ciboulette et du sel, vous avez une sauce blanche maison), prenez des crudités fraiches et essayez de faire votre pain ou votre galette.” Concernant les frites, il a la solution : “préférez la cuisson au four, nettement moins grasse qu’à l’huile. Ajoutez quelques épices pour le goût, et un peu d’huile d’olive ou colza (évitez l’huile de tournesol) pour le fondant de la pomme de terre”. Ça nous donne faim… Régalez-vous !
La question n’est donc pas de faire un choix entre le kebab ou le sport, mais de trouver un équilibre entre l’apport calorique, la dépense calorique, votre rythme de vie selon vos objectifs. Si vous n’en avez pas et que votre alimentation est équilibrée, un petit plaisir de temps en temps ne fait pas de mal. Si vous avez pour objectif de perdre du poids et plus particulièrement de la masse grasse, préférez une alimentation peu grasse. Évitez donc les kebabs trois fois par semaine. Si vous avez un objectif de prise de poids et de masse musculaire, le kebab a l’avantage de représenter un grand apport calorique au ratio de la quantité. Et c'est encore mieux si les aliments sont de bonne qualité. Kebab vs sport se termine sur un match nul (et nous, on est contents).
Pour moi chef, c’est kebab classique mixte, sauce blanche, salade/tomates/oignons, sans boissons sucrées et avec quelques frites !