Pour son premier trek en Amérique du Sud, Cédric choisit l'Équateur. Coincé entre la Colombie au nord, le Pérou au sud et à l’Est, il possède entre autres choses les montagnes et volcans de la cordillère des Andes. L'occasion rêvée d'explorer et de découvrir son premier sommet à 5000 mètres d'altitude.
Les photos ont été prises en argentique et scannées.
Latacunga est une ville agréable dans l’ «avenue des volcans » située à 84km au sud de Quito et à 2760m d’altitude. La ville est une bonne base pour visiter des sites comme les marchés typiques de Pujili ou de Saquisili ou encore la laguna de Quilotoa. C’est justement ici à Quilotoa que je rencontre Patrick, un grand gaillard athlétique des Hautes Alpes, on sent que c’est un montagnard. Le courant passe de suite entre nous. Il me propose l’ascension facile d’un sommet à plus de 5000m, l’Illiniza Norte qui culmine à 5 126m d’altitude. Le jour J tôt le matin nous prenons un bus pour El Chaupi, le dernier village où nous pouvons faire le ravitaillement, au-delà plus rien et nous commencerons l’ascension. Le village est à 3 345m d’altitude. Nos sacs sont allégés, nous avons laissé le surplus de nos sacs à l’hôtel à Latacunga.
Depuis El Chaupi nous suivons à pied une piste à 4x4, inintéressante, les 4x4 nous envoient leur poussière en nous dépassant. Nous arrivons enfin au parking au bout de 2h30, à partir de là, tout le monde sera à pied, la montée sera beaucoup plus agréable.
Nous mangeons un peu avant de commencer l’ascension jusqu’au refuge. Plus nous montons, plus la vue est grandiose, nous commençons à bien voir tous les volcans environnants comme le célèbre Cotopaxi, le Cayambe et l’Antisana, des sommets entre 5 700 et 5 900m d’altitude. La végétation change aussi, les arbustes ont de jolies fleurs de différentes couleurs. On a la pêche, nous arrivons en 2h et quart au refuge au lieu des 3 à 4 heures indiquées par le LP. 4 600m d’altitude ! J’ai battu mon record d’altitude qui datait du camp de base des Annapurna au Népal.
L’Illiniza sud à gauche et le nord à droite
La belle vue sur d’autres sommet
Nos posons nos sacs au refuge, c’est 8$ la nuit, il y a des Équatoriens, des Américains, des Allemands et des guides locaux. Boostés par la pêche qu’on a eu pour arriver là, nous grimpons jusqu’au col qui sépare les deux sommets des Illiniza, le « sud » et le « nord ». Le « sud » est beaucoup plus difficile à gravir que le « nord », il est couvert de glacier, c’est beaucoup plus technique comme ascension avec crampons, piolets, cordes,.... Le sommet nord est dépourvu de glace et de neige.
A l’origine, ces deux sommets de l’Illiniza n’étaient qu’un, c’est un volcan qui est entré en éruption, dont le sommet a explosé et s’est séparé en deux.
La dernière petite grimpette au col m’a donné mal à la tête, m’a mis à plat, j’ai envie de vomir, ce sont les effets de l’altitude, nous redescendons au refuge, je me pose pour récupérer. Une randonneuse allemande est bien plus mal en point que moi : elle est couchée et prostrée sur un lit, son compagnon nous raconte qu’ils ont fait les idiots en grimpant directement au sommet depuis le village d’El Chaupi. Ils sont montés de 3 345m à 5 126m d’altitude en une journée, c’est trop, ils devraient même redescendre pour ne pas risquer plus grave…
Moi, en revanche, je me rétablis vite et je suis même shooté par l’altitude, je pète la forme, je suis euphorique. Pour le coucher de soleil, tout le monde sort, le ciel est beau, les sommets sont colorés et la mer de nuage est là. La nuit tombée, nous préparons chacun nos repas et faisons connaissance. L’ambiance est sympa, les Américains préparent leurs crampons pour le sommet sud, on aide un peu les Allemands terrassés par le mal des montagnes, les Équatoriens mettent l’ambiance, les guides parlent entre eux.
Mais il faut dormir, tout le monde se couche, lever tôt demain matin pour faire l’ascension.
Je n’ai pas eu l’impression d’avoir dormi, que la nuit a été longue et froide ! D’abord les équatoriens sont de grands bavards, ils ont longuement discutés, obligés de dire plusieurs fois « silencio por favor » pour qu’ils se taisent enfin. Ensuite je n’avais apporté qu’un léger sac de couchage, j’ai dû mettre tous les vêtements de mon sac pour ne pas trop grelotter, ajouté à cela les effets de l’altitude, dès qu’on se retourne dans le lit on s’essouffle.
Dès 4 heures du matin, les premiers grimpeurs se préparent, nous, nous levons à 6 heures.
Bref, une longue nuit dans le froid. Cette nuit me servira de leçon pour le voyage suivant effectué en Bolivie, j’ai emporté cette fois un bon sac de couchage de -5° pour ne plus subir ce genre de nuit en altitude !
Il fait froid, j’ai une main gelée et douloureuse, en plus le sentier est peu visible, heureusement qu’il y a quelques cairns. J’ai un peu de mal au début, je m’arrête souvent, mais je sais que je suis un diesel, dès que je suis chaud, je ne m’arrête plus. Nous arrivons à un passage difficile et aérien, il faut mettre les mains et un peu crapahuter, c’est le « paso de la muerte », le nom fait flipper.
Nous arrivons au sommet, je suis heureux : premier 5 000 ! Moi qui adore la montagne, je jubile. Je suis quand même dans un état un peu second à cause de l’effort et de l’altitude. Quelle vue ! Nous voyons à 360° tous les sommets des environs dont le Chimborazo, le plus haut sommet d’Equateur, Nous voyons même les américains sur le glacier en train de gravir le sommet sud. Je savoure l’instant, je me dis encore une fois que j’ai de la chance d’être là, de vivre ce genre d’aventure à l’autre bout du monde. Chaque voyage apporte ces moments de bonheur que je savoure et dont j’ai besoin, mais encore faut-il les provoquer ces moments, ces voyages ! (petit message à certains en passant).
Heureusement qu’il a fait beau car je n’imaginais pas l’ascension sous la pluie ou dans le brouillard. Par beau temps, l’ascension ressemble à celle d’un 3 000 pyrénéen (merci Serge !*): il faut être bien équipé, avoir la pêche, être un peu entrainé et avoir un minimum d’expérience de la randonnée. En fait le sommet m’a rappelé certaines crêtes pyrénéennes mais en rajoutant les effets de l’altitude.
La descente vers le refuge est bien sûr plus facile. Au refuge nous nous faisons un thé pour nous réchauffer. Puis c’est la descente vers El Chaupi, plus nous descendons, plus il fait chaud, le soleil tape fort. A El Chaupi on engloutie un coca en attendant le bus de Latacunga, nous sommes crevés.
Au retour à Latacunga nous partageons une chambre avec Patrick et nous nous séparons le lendemain, lui veut faire le Cotopaxi, un volcan actif couronné de glaciers à 5897m, il le fera avec un guide. Et moi je veux partir vers la forêt amazonienne. En tout cas merci à lui de m’avoir motivé pour cette ascension, je ne l’aurais pas fait seul. Nous nous sommes revu avec Patrick à Banos, aux portes de l’Amazonie et chez lui dans les Hautes-Alpes, une belle rencontre.
Depuis j’ai tutoyé et même repassé la barre des 5000m mais sans faire d’ascension de sommet, comme en Bolivie par exemple.
Que j’aimerais refaire une ascension de ce genre, pourquoi pas même un 6000 ?